Ce matin, le ciel est bleu, bleu crémeux, peut-être parce que les nuages se sont fait la malle, ou qu’ils ont enfilé un jeans, et planqué leur coiffure chantilly dans des baskets.
Je regarde loin, quand je vois une soucoupe volante, en forme de Paris Brest, pas celui de Jacques Genin ni celui de Conticcini de la Pâtisserie des Rêves, non, le Paris Brest de ma belle-sœur, Marie-Pierre.
Elle est un fin cordon bleu, et au regard de la famille et du cercle des initiés, ses pâtisseries s’apparentent à des compositions qui relèvent d’une autre galaxie, au confin du dicible. Mais rien ne sert d’en parler, je vous souhaite de connaître, un jour, le privilège de pouvoir les déguster.
Imaginez, ouvrant, grand, les orbites, je règle mes pupilles et, de manière instantanée, je sens la vague salivaire monter. Ensuite, je me retrouve à la confluence du bouddhisme et du zen, entre l’impermanence des choses et l’étincelle d’éternité. Je comprends que je vis un moment rare qui connecte mes neurones et mes synapses, en profondeur, pendant que mes doigts de pied battent de la semelle, en toute discrétion. Je suis alors persuadée que les extra-terrestres de la pâtisserie ont dû siphoner le cerveau de ma belle-sœur.
Revenons sur terre, la pâte à chou est croquante, légère, goûteuse, du sucre glace habille l’ensemble. La crème pralinée onctueuse et généreuse s’est reposée dans un cul de poule, et je me dis quelle chance pour ce cul-là, il devrait garder la mémoire des saveurs et d’autres pâtisseries devraient y laisser leur empreinte. Mais peu importe les outils quand le cordonnier connaît son métier.
Résumons, c’est et ce fut divin, le jour J et 48h après, et aujourd’hui encore jusqu’à la fin du fin (de ma vie). Ce moment de joie s’ajoute au plaisir de l’instant, c’est une expérience où l’amour tient sa place, sans parler de celui du partage. Regarder les 8 convives, les yeux rieurs, et les écouter s’extasier, c’est une joie, un tremblement qui font un bien fou. Assurément, j’en reprendrai bien encore un peu de ce Paris Brest-là.
Ce souvenir sensoriel se rappelle à moi au moment où je pars en Bretagne, pas du côté de Brest, mais du côté de la Capitainerie, pour retrouver le goût des aliments iodés et l’empreinte du thermomix d’une chef hors pair (ma belle-sœur s’est dotée du même outil), et surtout mon essentiel, mon oxygène, la présence apaisante de mes amis bretons, Cécile et Felipe.
En préparant mes bagages, j’ai gardé une place pour ma pulpe et mon poulpe, qui dans le train regardent à bâbord et tribord et sourient à qui mieux mieux, happés par le ciel bleu crémeux, sur le chemin de l’océan.