ABM : à propos du voyage au long cours 

Un voyage au long cours, je sais un peu ce que c’est, car mon existence sur la terre ronde est déjà bien entamée. Toutefois, partir seule, dans un pays de culture et de langue quasi inconnues, et par conséquent, choisir de s’extraire de son environnement proche et confortable, c’est autre chose, même avec les moyens de communication actuels, dans un pays très sûr et avec un minimum de préparation.

Je dirais que cette aventure personnelle, partagée et très intérieure aussi, c’est une sorte de voyage au long cours mais plus ramassé, sur un temps relativement « court », qui nécessitera une période de décantation, tout en faisant déjà un sacré effet sur le petit mousse apprenti de la navigation que je suis.

Souvent, j’ai pris la vague avec enthousiasme, fougue et candeur et ça a marché, je n’ai pas avalé d’eau salée, peut-être parce qu’il n’y avait pas d’autres enjeux que d’être là avec l’Autre, ou parce qu’on m’a souvent prise pour une japonaise, ou une gaijin implantée de longue date ?  Ce fut encore le cas cette après-midi, au supermarché.

J’ai, par dessus tout, aimé vivre des bribes de vie quotidienne avec toutes les générations. J’ai été passionée par nos échanges sur la mutation du monde et le choc des générations. Ces instants simples et précieux, je les ai vécus à 200%. J’étais dedans, mes sens, mon intelligence, tout était en éveil, aux aguets, portée par un flux circulatoire permanent, de type montagne russe et ça allait à fond, c’était vertigineux. Un train, oui, mais avec beaucoup d’entrain comme je l’ai écrit.

Le partage, c’est juste essentiel pour moi, c’est mon combu, au sens énergisant, mais aussi en prenant l’acception de cette petite algue dont je vous parlais dans mon précédent article, ce midi, qui vient relever le goût du riz, le kombu. Le riz c’est un aliment de base et hop un peu de kombu et ça change tout, même si le riz reste du riz, parce que grâce au kombu, on passe du riz à un plat, on est sur autre chose, mû par l’idée de transformer la chose et de se transformer soi, l’autre, voire le monde pourquoi pas ?

Cet article, c’est un résumé qui dit rien et qui dit tout. Car voyager, c’est juste impossible à mettre en mots, en photos ou en dessins, c’est trop réducteur. Et certainement trop tôt, cf. la période de décantation dont je parle plus haut. Vivre, c’est pareil, c’est impossible et nécessairement possible à dire par des moyens, à inventer soi, pour mieux se re-inventer !

Tout ça, c’est de la rhétorique, me direz-vous, certes. Mais être vivant et voyager n’est peut-être que celà ? Non c’est aussi de la dialectique. Qui serai-je sans mes amis philosophes grecs ? D’ailleurs, ce matin, dans le cimetière, j’ai beaucoup pensé à Jacqueline de Romilly, qui est enterrée au cimetière de Montparnasse et que je suis allée rendre visite à un moment important de ma vie.

Merci de votre compagnie ! J’espère ne pas vous avoir trop rasés de loin. Bientôt ce sera de près pour certains !

PS : le disque vinyle que l’on aperçoit derrière la vitre d’une porte d’un café  (cf photos ci-dessous) c’est à mes yeux et surtout à mes oreilles, le plus beau disque de piano que je connaisse. Il est signé Arturo Benedetti Michelangeli. ABM pour les amateurs était un excellent pianiste italien mais aussi un être qui recherchait le risque et l’exception aux confins de l’excellence. Il a conduit des formules 1, il cherchait le son parfait, il démontait et remontait ses pianos de concert, il était un brillant skieur, il a donné des cours, qui n’en étaient pas, à Martha Argerich, entre autres. Ce disque-là est une synthèse de l’œuvre de piano de Chopin, une gageure comme de résumer un long voyage ou une vie. Tout y est et il n’y a pas d’autre chose à dire. A chaque écoute, je l’écoute, muette, concentrée, emportée par la musique. Ici, ce n’est pas l’interprète qui compte c’est l’œuvre. Pas de sentimentalisme outrancier, juste la musique. Ou comme l’a dit Godard il y a ceux qui font des films et ceux qui font du cinéma.

Nota : le café qui expose ce disque génial s’appelle le « coffeeann » et se situe à 5 minutes de ma chambre. Forcément, j’irai demain boire un café et parler de tout, de rien, de la vie, de voyage et de musique, et de l’utilité de l’inutile…

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2 commentaires

  1. Emilie dit :

    Le voyage consiste pas à chercher de nouveaux paysages mais à avoir de nouveaux yeux.
    Marcel Proust
    Bravo

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    1. Haï ou Ha ! Arigato gozaimass

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