J’aime le orange, la couleur orange, qui symbolise et concentre la vie sous ma peau, pleine de jus et de pulpe, de bosses et de creux. Sans se presser, le orange assure la transition entre mes jours et mes nuits. Il pousse la nuit ailleurs, éveille ma rétine, cuit ma peau, et titille mon coeur fleuri de petit échassier. Il encourage le jour à sortir le bout de son nez hors de ma couette et le faune à jouer un prélude, sous le regard gitane de ma fée ou océanique de mon Captain, quand vient l’après midi.
J’aime le goût de l’orange mais je préfère quand le orange me mange. Les jours de grand froid, il se colle à mon cou, lové en écharpe et articulé par des franges aux allures d’encornets. Je ressens doucement ses baisers abstraits, et je perds pied. Ce soir, il m’a donné rendez-vous dans une orangeraie…aux confins de l’anti-Atlas, c’est loin hélas. Je cours déjà, en réservant mon souffle, l’œil attentionné, les orteils à l’envers.
Le orange c’est l’étrange étranger de soi, un bout essentiel de son identité, été comme hiver, aujourd’hui comme hier ou demain et encore après.