« A bout de souffle » is back

Si maman me voyait, elle me dirait « tiens, voilà mon troisième garçon » ! Mon côté raisonnable, en apparence, a besoin de flirter, de temps en temps, avec le pétage de plomb et que l’explosion soit visible, autant laisser des traces, histoire de faire son intéressante, et de se faire remarquer…

Ce soir, il faisait chaud, et après notre sortie de service, j’avais besoin d’aérer ma caboche. Cuisiner rue de Penthièvre à l’Atelier des Chefs, dans le cadre professionnel, ça libère les neurones…Peut-être que monter la chantilly à la main en vue de réaliser des tiramisus à la fraise ne m’a pas tirée vers le haut, car n’est pas la crème de la crème qui veut !

Cette coupe courte me ramène 20 ans en arrière, comment ne puis-je me souvenir de ce pull noir avec une marguerite, de la photo aussi ? Il paraît que les cheveux connaissent plusieurs vies et donc les cellules aussi et le cœur probablement, si et seulement si, il peut encore croire à l’impossible.

En attendant je ne sais quoi, car je n’attends rien, ni qui que ce soit, je me passe la main sur la nuque et je me dis, tout simplement, qu’est-ce que c’est doux, doux comme un nid douillet de petit poussin.

 

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De l’Aneth à l’âne pas net

Le dimanche, l’âne que je suis peine à sortir de son pré. Il se sent loin de l’envie d’évasion, préférant son nid vert, son pré carré plutôt rectangle, à la prairie lisse et feutrée du parc Monceau. Pas tout à fait nette, l’Aneth broute sur les tapis de son parquet. Elle croque des insectes et les protéines se collent entre ses dents. Au milieu de l’océan, elle nage avec sa baleine sortie droit du tapis blanc. Elle n’est pas d’ici, l’Aneth pas nette. Elle vit au milieu des cro cro d’îles, se laisse porter par les vents doux économisant ses forces logées dans ses chaussettes. Elle sait que tôt ou tard elle devra aérer ses neurones et sa peau pour se battre contre les mauvaises bises ! Parfois, elle théorise mais le plus souvent elle concrétise en ne faisant pas grand chose. Contemplative, elle oublie qu’elle est une herbe et que ses racines sont ancrées profondément au centre de la terre.

Les rimes s’arriment à la frime

A Kyoto, je tartine ma peau d’huile de riz, assise en tailleur sur un tatami. La chouette hulule, je bois un pinot gris et me sens flotter comme un rhizotome dans son officine, empreinte d’auto-dérision et de nostalgie.

Jour et nuit, inlassablement, je recherche le biotope de l’essentiel, l’origine du lien avec la chlorophylle. Aneth ou herbe, j’antigonise et j’ouvre l’œil qui ironise.

Pas besoin de peser dans la réalité pour exister. D’humeur et de constitution légères, je grimpe aux arbres pour causer avec les écureuils et les alouettes. Pendant ce temps, les grenouilles me tirent les oreilles … et rivalisent de bavardage avec leur immense bouche !

Esquissant des histoires avec des mots, je crée pour faire écho à rien d’autre qu’au monde, à ce qu’il est davantage qu’à ce qu’il paraît être.

J’ausculte les poncifs et les représentations de la complexité de notre civilisation en pleine mutation. J’essaie d’en comprendre les ressorts, rien qu’avec les yeux, et les oreilles. Attention à l’ouverture de la boîte de Pandore. L’Histoire ne se répète pas à qui sait d’où il vient et où il va !

Au fond d’une cavité, j’aperçois un récif serti d’anémones, aux allures de sirènes. Je leur marmonne un chant polyphonique, un hymne de marin. En réponse, elles m’embrassent. Surprise par leurs baisers enveloppants, je bois la tasse et esquisse une brasse coulée.

Pour me désaltérer, je repère une bière qui n’amasse pas mousse. L’orge maltée fermente, les levures indigènes se déchaînent.

J’ai pris un bain de forêt avec le noyer de notre maison

Dans le jardin villetrunois de mes parents, un noyer s’est posé et s’impose, avec majesté, depuis 1910. Il se tient sur ses racines invisibles et profondes, et son tronc le conduit haut dans le ciel, tiré par sept branches. Papa l’a équipé de deux protections de couleur verte là où deux branches ont cédé. Grâce à la main d’un homme amoureux de la nature, notre noyer ne devrait pas pourrir par infiltration d’eau dans son écorce. Vêtu d’un imperméable, il est aussi notre rayon de soleil.

Sur les conseils avisés de mon Captain, je l’ai entouré de mes petits bras musclés. Son tronc est trop large, et mes membres supérieurs trop courts pour que je puisse l’enlacer entièrement. J’ai écouté le battement de ses veines, et palpé ce sentiment de vie qui nous réunissait. Et, alors que les nuages formaient une ronde au-dessus de nos têtes, j’ai pris racine autour de mon noyer, oubliant le temps, cheminant vers l’essentiel…

Chérir un arbre et se laisser chérir par lui, voilà une drôle d’idée pour certains d’entre nous. D’origine japonaise, ce bain de forêt « shinrin yoku » est une manière de se rappeler que l’homme a besoin de dame nature, et qu’en soignant nos arbres, jeunes ou centenaires, ils nous soignent à notre tour.

Devenir ce que l’on est

Parce ce qu’il n’y a pas de soi sans le monde et qu’un monde sans le soi est possible, je me sens devenir ce que je suis dans le monde qui est. Il pleut, il fait gris et je rayonne au dedans. Parfois, c’est le contraire. Naturellement, je pratique l’intelligence inversée, je regarde et me sens regardée, la porosité de mon être avec le monde et les autres est quasi totale. Les filtres, je les nettoie souvent, très souvent, car la connerie s’y concentre. La mienne et celle des autres. Le refraichissement est salvateur, pour cela rien de tel qu’une toile dans un musée, ou la rencontre avec un être cher amusé, par nos intelligences complices et inversées.

Schtroumpfette à la houpette en goguette

Partout où il fait jour, la nuit s’ennuie, et entre les deux, je suis étendue sur mon lit. Blottie au milieu, je ne lis pas, j’écris, je récidive. Mon côté mousse en mouvement se met en suspens et à penser à ce que je ferais si j’étais une schtroumpfette à la houpette en goguette, naviguant dans un tonneau d’orge maltée. La marée m’emnivrerait et les émanations d’iode me montreraient au nez. Atchoum la Schtroumpfette, tu dégazes, aère tes ouies… Le jour et la nuit se regardent, je les rejoins, et je ne sais plus qui est qui. C’est l’heure de rejoindre mon oreiller et de voyager au pays du fromage et du chocolat. À quoi j’ajoute, que fait le soleil quand la terre tourne en rond, autour de lui ? Bah, ces ellipses ça doit lui donner le tournis ! Allez une petite valse, histoire de sortir de la piste, la tête à l’envers… et pour mieux voir le monde à l’endroit sans avoir peur de courir autour du soleil et de rayonner à son tour !

Temps polaire, la couette est salutaire !

Le froid polaire devrait être le prétexte à une hibernation sous couette sauf que la couette ne fait pas bon ménage avec le boulot. J’imagine la cohabitation, le matin, dans la ligne 13, chacun emmitouflé dans ses plumes et sa housse, l’oreiller scotché sous sa nuque, revêtu de son pyjama. Nous pourrions dormir debout, et ronflouiller, le sourire en coin pour les plus éveillés. Dans le métro, tous ensemble, nous prolongerions la nuit, l’ombre de nous-mêmes, à moitié conscients. Ainsi, en proie à un profond sommeil nous serions incapables de sortir à la bonne station de métro, et nous nous retrouverions tous au terminus. Le plus drôle serait de voir la tête des collègues encouragés à hiberner dans les salles de réunion, sorte de sas de compression. Possible qu’après avoir fait des pyjamas parties ensemble, nous nous sentirions investis de la nécessité de poursuivre notre complicité les yeux ouverts. Les cheveux hirsutes, la gueule enfarinée, le sommeil diurne nous rassemblerait…

En attendant, nous nous protègeons du froid et des autres êtres vivants en multipliant les couches (de vêtements et de rôles de représentation) par dessus et par dessous, pour rejoindre nos destinations ou nos destinées !

Finie la SF, l’heure est venue de coincer mon museau amusé sous la couette, loin de là ligne 13 et des salles de réunion ou des collègues, et de déposer mon ombre solaire car la couette est salutaire.

Conseils zavisés des zamis

Tout petit, le bipède, à peine né, s’invente des zamis; son ours en peluche, le lapin, le poisson rouge et ses jouets tiennent cette place dans son coeur… Puis, le bipède grandit, il ira à la rencontre des filles et des garçons dans la cours et sur le banc de l’école, des filles et des garçons qui deviendront pour certains d’entre eux des compagnons de route et de déroute, de doute et de joie, des compagnons amis, des êtres indispensables à son existence. Et plus tard, le bipède vieillissant, en passant la brosse à cheveux le matin, se coiffera avec certitude, sans y penser, un œil vers le miroir extérieur et l’autre rentré, tourné vers le dedans, avec cette certitude que l’équilibre de son mouvement (y compris de la brosse à cheveux) doit beaucoup aux zamis.

Des zamis ce n’est pas automatique, il ne suffit pas d’être branché sur Facebook, Instagram ou Twitter et d’avoir des centaines ou milliers de followers pour se sentir tout près d’eux ou de lui. C’est un réseau humain qui n’a rien de numérique, il est plutôt alphabétique, il procède d’un cheminement itératif et interne entre l’alpha et l’oméga, rien de facile et de reproductible. La parole en est la chair et le noyau et l’oreille un conduit qui mène à l’écoute du cœur et de l’intelligence des esprits.

Ca peut paraître suranné et con les conseils des zamis mais c’est un gage de l’âme amie. Je crois en l’amitié, et à l’ami qui ramène sa fraise, car il me donne à exister plus que les réseaux sociaux et la surface des choses. Il est la vie, il est un bout essentiel et nécessaire à mon existence. Je ne cheminerai pas sur le même chemin et vers les mêmes horizons si je n’avais pas mes compagnons zamis dans mon cœur et dans ma tête. Mes mots sont les leurs, pas de mensonges encore moins de leurs. Tiens, c’est l’heure d’aller me passer la brosse à cheveux, et de se faire un brin de toilette pour commencer la journée.

L’air à la fois fou et sage

Dans le métro, là maintenant, je me questionne, parce que c’est comme ça. Et je me dis, la sagesse c’est une forme de folie douce. Posée sur un strapontin, je ne me résigne pas, je me pose entre deux mouvements. Comment vivre sans gommage, non pas du visage comme sur ma photo, mais de certains moments de son existence ou d’événements extérieurs ? J’avoue l’exercice difficile, baisser les bras, mettre les mains dans mes poches ou fermer ma bouche ce n’est pas vraiment ma qualité première. Il faut que je parle voire si je peux que j’agisse en restant immobile ou en initiant le mouvement. Face à l’égoïsme, la connerie, et la violence générée par ces états de l’être, un coup de gommage sans dommages et ce serait différent. Peut-être pas mieux mais l’énergie vitale et positive de certains d’entre nous ne serait pas phagocytée.

Être fou et sage part d’une même intention, mettre son intensité dans ce qui vous semble essentiel et dans les deux cas, aux yeux de l’opinion, il s’agit de se recentrer sur l’inutile, à savoir la paix, l’Amour, la liberté. Alors oui, je revendique ce pléonasme d’être à la foi folle et sage.

Antigone gone tranquille

Ce matin, j’ai sauté dans mon slip, la tête dans le cul, c’était joli, loin de là performance du contorsioniste. Un brin d’eau sur ma peau, un soutif pour les pommes de mon jardin et le mouvement de ma brosse japonaise en bois de rose sur mes petits cheveux raides. Toute ensommeillée, j’abordais mon dimanche avec sérénité, un contre-emploi pour l’Antigonegone que je suis.

Il a suffit d’un échange pour que mon odyssée prenne une autre vague.

J’aime l’imprévu, j’avoue être incapable de renoncer lorsque l’autre ami, copain, collègue me fait les yeux doux. Oui, j’ai un goût irréfutable pour la rue et la vie en extérieur qui me fait oublier le cheminement du dedans. Et cet entrelas de routes sous le ciel passe toujours par des mots, les bons mots et le saut léger du matin dans le slip, le bon slip !

Ainsi va Antigonegone tranquille.

Ps : ce petit panneau « do not disturb » provient d’un hôtel à Bordeaux désigné par Philippe Starck (le mama Shelter). J’y suis allée dans le cadre d’un séminaire managers et j’avoue que cet écriteau devait réapparaître tôt ou tard dans l’univers d’Antigonegone !

Ma chouette a craqué, elle avait les crocs

Pourtant, je me suis levée tôt pour un samedi. Serait-ce l’effet conjugué d’un sommeil réparateur et de la Brooklyn lager de la veille ? Ma chouette, attentive aux vibrations de mon réveil, a choisi de se planquer et de se grimer d’une forme de transparence car elle n’était pas fière, m’a-t-elle précisé plus tard. Elle était affamée pendant mon sommeil et avait frétillé devant la présence d’un biscuit en forme de cœur, offert à son regard, dans la petite panière en osier. Elle a craqué, elle avait les crocs. Drôle d’oiseau de nuit quand même, lui ai-je répondu. Elle a ouvert ses ailes et s’est blottie contre mon cœur et nous avons rigolé. C’est samedi, et le soleil bleu nuit n’a pas fini de nous faire les yeux doux comme toi joli volatile lui ai-je répondu. Elle a secoué son popotin et est partie ronflouiller dans son coin préféré, mon oreiller. Ainsi, me confie-t-elle, elle aime à se laisser bercer par mes idées qui entrent et sortent par mes oreilles et s’impriment dans les plumes de mon oreiller.

Avec ma drôle de chouette, c’est du délire en barre, on se fait du bien au-dedans, on se compte les plumes, et on se défrise. Après le délire du croisement matinal, elle s’endort et je commence ma journée et ainsi de suite, ensemble nous assurons les 3 x 8, c’est pourquoi il règne une chaleur sans égale dans le nid.

Ma chouette boit de la bière en regardant jouer la grenouille et le lapin

Sur une feuille de lotus, ma drôle de chouette boit de la brooklyn lager, une bière légère, blonde américaine, et navigue entre spasmes et pléonasme du houblon. Un brin de paille collé à ses petites lèvres, elle aspire les bulles qui lui gonflent le ventre et lui tourne le cœur comme un batteur. Pour devenir plus aérienne, elle libère des gaz, sans émission de CO2. Des fumées oranges sortent de son cerveau, et lui donnent l’occasion de le vider du côté droit. Un ptit coup de pouce, et pschitt, elle ranime sa créativité en buvant l’air de la mélancolie.

Sa promenade sur l’eau l’invite à l’ivresse extérieure, la tête à l’envers. Léger et silencieux son duvet de plumes se dresse pour diriger son embarcation. Sous le charme de l’instant, sans réfléchir, elle avance à la godille, en s’ appuyant sur une tige de bambou, les yeux pleins d’étoiles. Ne sachant plus pourquoi elle a franchi la limite du réel (pour mieux se rapprocher de l’imaginaire), elle freine, émue par le jeu enfantin d’une grenouille et d’un lapin sur la rive. Elle aimerait plonger la tête dans l’eau, les rejoindre et être de la partie sauf qu’elle risque d’y perdre des plumes. Dans sa besace, elle n’a pas qu’un tour, mais une kyrielle de déguisements dont une combinaison en néoprène. Un coup de baguette magique et là voilà se glissant dans l’univers merveilleux et débridé de la grenouille et du lapin.

Depuis qu’ils se connaissent tous les trois, ils sont devenus inséparables et sillonnent les eaux du delta, poussés par le vent, et l’air vivifiant du large. Ce soir, le lapin et la grenouille dansent le Swing à six temps sur la piste d’un dancing, et ma drôle de chouette remue son cœur carotte, de joie et de plaisir, en sirotant une bière IPA. À son tour, elle soulève le voile et entame une transe entre le ying et le yang.

Tortueuse, la tortue nage entre les nuages

Bipède du 21ème siècle, de sexe féminin, quasi quinqua, urbaine et barde de si de la, révoltée du dedans, j’écoute et perçois le ronronnement du monde, son cri permanent et sourd, qu’il fasse nuit, qu’il fasse jour. Pour m’aider à respirer, j’ôte mon tuba, j’avance en me rapprochant toujours plus près, de ceux que j’aime et qui m’aiment, j’avale la tasse, je prends la vague. Avec nos branchies, membres de la famille et amis, nous nous infiltrons tout bas, en silence, sans faire de bruit. Parfois, comme ce soir, je laisse libre cours à mon imagination, je créé pour libérer mon tourment, et faire circuler une forme différente de vérité, affranchie du langage commun de tous les jours. Je crois au héros qui pleure, car les dieux n’existent pas, car la vie n’est pas un mythe, et sur le chemin de l’Odyssée, j’ose l’humanité sans en avoir peur, jusqu’à assumer ma mortalité. J’appuie sur les boutons du cockpit, je suis la vie, je la regarde en face, dans les yeux, je vacille. Je vois clair, je reste silencieuse, c’est mieux. Habitante de la terre ferme, je suis, je suis enfin, petit à petit, ce que je suis, et pourtant, je commence à peine à sortir de ma carapace, telle une tortue tortueuse, jusqu’alors un peu trop sage et heureusement coupable d’errer sans but. Désormais, j’apprends la nage, la nage entre les nuages.

Embrasse la vie à pleine bouche ! 

Aujourd’hui, samedi de janvier, les jours s’étirent, les muscles se détendent et le cœur se régénère en attendant le printemps. À peine éveillée, je me mouche, puis dans l’escalier, qui me rapproche de la terre ferme, je fais mouche, les deux pieds joints, je passe la première et sur la piste de décollage de mon nid, j’ouvre ma bouche pour boire la vie.

J’embrasse l’air, le temps d’une respiration,  je le désire pleinement cet oxygène, je le dorlote, je suis ses méandres qui s’insinuent entre mes dents. Je frissonne au de-dedans, je sens l’amour, celui qui est grand, qui n’a pas qu’un seul visage car il réunit tous ceux que j’aime et qui m’aiment. Il me remplit il me remue il me balance dehors pour mieux envisager le temps dans sa plénitude, dans son infiniment petit, là, tout de suite, maintenant. Je souris sur le pas de la porte, comme un chat, je regarde ce qui est invisible, et j’écoute le silence, mes moustaches me réchauffent les orteils. Sous le ciel gris, je miaule les pattes accrochées au bitume, l’œil brillant, car aujourd’hui, je sens je sais que c’est un temps d’hiver rempli de bouches qui respirent grand et qui embrassent profond. J’imagine le moment des retrouvaillles océanes, les mots s’effacent, nos bouches se confondent, la vie nous enlace, j’embrasse la vie.

Jour de pluie, œil qui frise (derrière le capteur, je vois les choses en face)

L’image n’aime rien d’autre que de sortir de sa boîte, même les jours de pluie ou les soirs de tempête. Et, parce que je suis sage comme une image, je vais voir ce qui se passe à tous les étages du monde à ma portée. Je descends les escaliers, avec en tête, un motif, aérer le museau de mon appareil photo, pour mieux me rapprocher de la chair et du vide, et jusqu’à la lie remplir mes yeux captifs, de lumière des Autres et du ciel.

 

Angel point, mon combat avec l’Ange

Pour avancer, physiquement ou intellectuellement, et vivre en harmonie au plus près de mes congénères, il m’importe de voir, écouter, lire, et de ressentir à fond les ballons le mystère de l’inconnu de l’existence en espérant rencontrer l’amour sur mon chemin. La question qui me porte chaque nano seconde, c’est « pourquoi », autrement dit être en mesure d’expliquer, mue par la soif de sens, le besoin de savoir qu’il n’y a peut-être rien à savoir…Étonnamment, ou pas, j’en perds parfois la boule ! Le « je sais que je ne sais pas » de Socrate est ancré dans mon identité, le questionnement et le doute actionnent mon moteur. Vroum vroum, je passe la seconde. 

Je suis un être en apparence carré, plutôt rond aussi dans mes relations aux autres et rationnel, les orteils posés à plat sur terre même si mon gros orteil apprécie d’être courbe comme tiré par un fil qui semble le relier à un arbre. J’ai conscience du réel, de ses contingences et de mes prérogatives. J’avoue aussi que cette partie de la vie, de ma vie, m’ennuie un peu car trop prévisible, tracée, convenue. Elle me permet de gagner ma vie et de me connecter aux autres sur terre, de satisfaire mes besoins premiers. En revanche elle ne me sort pas de moi, ni des sentiers battus, elle ne me permet pas de grandir au-dedans pour donner en partage au-dehors. L’humanité de mon être est circonscrit dans mon noeud d’enfant que je porte au creux de mes oreilles, de mes mains, de mon cou et dans d’autres endroits secrets, ailleurs. 

Ce qui m’anime, ce qui remue ma part d’enfance, c’est mon combat avec l’Ange, l’Angel point, qui se situe entre réalité et imaginaire, dans un espace extra temporel et qui me gonfle de bien-être jusqu’à l’extase avant de me terrasser. Il est à son paroxysme quand je créé, par les dessins la musique ou les mots que je conjugue et couds comme des perles sous ma peau. Alors j’oublie tout, je me fonds dans l’œuvre inutile que mon corps illuminé fait ressortir. Ce phénomène se produit aussi quand je voyage seule ou quand je suis au contact de certains bipèdes que j’aime d’un amour profond. C’est une sorte d’arrachement, qui me donne rdv avec moi-même. Je me dis oui, c’est ça, c’est ça être vivant. Cela est encore plus fort lorsque je tombe amoureuse, et que Platon s’invite à ma table, la situation paroxystique de la grandeur à venir et de sa chute irréfutable sont aussi conviés. Même si je sais ce qui va se passer, je plonge dedans les deux pieds joints car je ne peux m’y soustraire. Il faut que j’y aille et que l’Ange me bouscule, me malmène, j’aime l’amour impossible qui laissera des traces et que je pourrai regarder les soirs de pleine lune comme des scarifications de sioux. Je suis incapable d’aimer les pieds dans la réalité, je sublime l’autre, je fais donc peur à l’autre, un moyen de l’éloigner pour mieux exacerber ce qui est ou pas. Je me raconte des histoires car le conte ouvre à des réalités multiples et à ma portée. Mon imagination dépasse l’entendement et c’est bien plus riche ainsi. L’Ange m’a donné rdv, il y a peu, et je suis tombée sur un os rose, beau à se damner, la tête la première. C’est étourdissant et merveilleux de croire à l’amour, peu importe s’il existe ou pas, ce qui compte c’est qu’il existe pour soi et qu’il nourrisse mon imaginaire et que mon imaginaire le nourrisse à son tour. Cette rose de Noël est un présent précieux car il me rappelle ô combien aimer d’amour est essentiel et rend vivant.

Aujourd’hui 25 décembre, je chemine heureuse, comme une enfant, qui vient d’ouvrir son cadeau de Noël et qui le regarde longuement sans savoir si le mieux est de continuer à le regarder ou de jouer avec. Finalement si je sais, je vais continuer à le regarder pour imaginer toutes les manières de jouer avec car je ne sais pas faire autrement. 

Nue dans la neige 

Ce que l’enfance m’a donné, c’est l’amour, la poésie, et l’amour de la poésie. Depuis, je creuse dans la neige, sous le sable ou le bitume, et parfois j’aperçois des morceaux d’amour, des bribes de poésie et je sens mes ailes d’enfant repousser le réel et franchir les barrières du ciel. D’un coup d’aile, je m’envole dans l’univers du merveilleux. 

Nue dans la neige, je n’ai pas froid, je fabrique un peu de poésie et d’amour dans mon jardin Villetrunois immaculé de cotons blancs que j’ai dérobés de la trousse à maquillage de maman. Je regarde ces boules légères et elles me regardent à leur tour, et parce que c’est inévitable, on se met à rigoler. Je convoque le vent et les flocons frissonnent. Ils se collent les uns aux autres puis à moi. Je me transforme en petite femme de neige. Une carotte biologique vient à pousser sur mon nez. De l’encre noir foncé et épaisse se rigidifie et s’invite sur mes yeux. Un rouge à lèvre or et ange vient s’écraser sur mes lèvres. Le baiser d’une princesse du grand nord m’endort. Je me mets à rêver à l’âge adulte, à une impossible aventure certie du bonheur d’aimer et de la souffrance amoureuse. 

C’est l’heure où Noël approche de son heure, les saveurs beurrées du tea time embaument le salon, j’ai fermé les yeux, la casquette irlandaise de papa vissée sur mon crâne en ébullition et mes lunettes de vieille anglaise m’autorisent à retourner dans l’enfance dont je ne peux me départir. 

Asie mutée, je ris au-dedans

« Asie, Asie, Asie, vieux pays merveilleux des contes de nourrice…  » ainsi commence le poème de Tristan Klingsor qui a été écrit en 1903 et mis en musique par Ravel, ouvrant sa trilogie Shéhérazade. Souvent, je fredonne cette mélodie française, et j’entends alors une autre voix que la mienne, celle de Régine Crespin sous la baguette d’Ernest Ansermet. Et, puis, je pars, en Asie, magnétisée.

Je choisis une embarcation en carton pâte, des rames en balsa et je remonte la Seine. Au dessus du port du Havre, je suis aspirée par un mouvement d’air, je monte sur les nuages, grâce à une corde à nœuds tombée du ciel, et je me laisse pincer les fesses par le bec d’un oiseau nocturne qui me prend sous son aile. Histoire de fermer les yeux, le temps d’un vol de nuit, j’imagine St Exupéry à l’époque de l’Aéropostale, alors qu’il survolait les Andes et qu’il s’est perdu.

Fermer les yeux, pour mieux les réouvrir ensuite et m’émerveiller comme dans les contes d’enfants.

Asie mutée, ou mutante, je ne sais ce qui m’attire. La diversité des cultures (52 pays ou territoires et plus de 2000 langues différentes), leur éloignement à la mienne, leur développement phénomènal, il suffit de regarder leur démographie (60% des 7,6 milliards habitants sur 29% de la surface des terres) même si elle est très disparate et inquiétante au Japon et en Chine malgré leur PIB extraordinaire.

En vérité je n’ai pas la clé, l’explication rationnelle m’échappe. En Asie, ce que je ressens… je suis saisie, je me déride, je me fonds dans les territoires et près de populations, des êtres humains que je ne comprends pas, parce que c’est logique que l’on ne se comprenne pas. Et pourtant, je ne m’y sens pas étrangère ni seule. Je deviens asiatique comme si je l’avais toujours été.

La nourriture y est autrement plus terrestre. Tout n’y est pas que riz et pourtant le riz est au centre de tout. J’ai entendu qu’au Vietnam dans le delta du Mekong, l’eau, du fait du réchauffement de la planète, devenait trop saline, alors ils sont en train de remplacer les plantations de riz par de l’élevage de crevettes.

Le sourire s’entend en Asie, il est comme un vent léger toujours présent, une vision fantomatique de la pudeur des sentiments.

Je suis Asie mutée et ris au-dedans, en chantant « Asie Asie Asie, vieux pays merveilleux des contes de nourrice… »

Sur ma bouche : la beauté du grain 

Sur ma bouche, ou plutôt juste au-dessus, un petit grain de beauté s’est dessiné, jusqu’à prendre pied puis racine. Peut-être est-ce le doigt d’un ange, qui passait par là, qui l’a semé, puis a transformé la surface de ma peau en un terreau fertile.

Les grains de beauté se sont donnés le mot, ils se répandent depuis des années sur mon épiderme. Je les collectionne, mais ne les compte plus, je laisse le dermatologue s’en charger et les observer, pour mieux les classer. D’ailleurs, il est recommandé d’être attentif, non pas aux formats réguliers, mais aux gabarits fantaisistes. L’important est de les surveiller alors je les ai à l’œil. 

Sur ma bouche la beauté est venue puis a ripé, mon grain, à cet endroit, exprime discrètement ce que je ne saurai dire aussi bien. 

Là, maintenant, je boirais bien une tasse de café, l’assurance de conjuguer grain et bouche et d’imaginer le doigt de l’ange … refaire une beauté au monde. 

J’avais 7 ans

D’aucuns disent qu’on ne change pas, fondamentalement. D’autres, parfois les mêmes, pensent qu’il faut un certain temps pour apprendre à comprendre le monde et à travers les autres, se découvrir et apprendre à se connaître, pour mieux devenir soi.

Aujourd’hui, je me dis que j’aime toujours les pois (cf photo d’école), que je continue d’apprendre et que la vie me semble légère comme la reine des pommes accrochée à son arbre Villetrunois !

Sur la route, rebelle, je me suis installée et parfois je quitte le nid pour mieux sentir le poids essentiel de ceux que j’aime.

Cette nuit,  je bois du thé glacé à leur santé ! Slainthe aussi, mais le whiskey ou ky c’est pour quand il fera frais dehors ou dans mon cœur.

En passant, ma chouette n’aime pas trop Cendrillon

En passant je regarde autour, avec une approche globale du mouvement, mon déhanché ne dénote pas sur le portrait du monde. Etrange spirale, soudain le tout synchrone et homogène s’efface pour laisser place à la singularité d’une rencontre, qui me saisit en retour, une forme de sortie de route, ou quand un électron tire un autre électron de sa réaction en chaîne. Je suis alors comme figée, tenue en suspension. Je pédale dans le vide, hors de l’automobile du temps et me surprends à sourire, les quatre fers en l’air, les pieds pris dans le tapis. Je comprends à ces instants ce qu’est qu’être vivante, grâce à cette sensation, du vif et du ralenti, qui ne se voit pas à l’oeil nu mais qui se ressent. Je ne sais ce qui provoque cette rupture spatio temporelle, qui me met à nu et m’étourdit. Peut-être est-ce une bulle de CO2 qui serait sortie du cerveau de l’Autre et qui aurait fait fi de respecter les quotas d’oxygène ? Je remonte à la surface, sans narcose, en franchissant les paliers tranquillement, je respire un air inconnu, et me resserre sur une ligne horizontale, sans frontière, animée par un seul but, mettre sur orbite nos êtres insaisissables, connecter nos bras en forme d’étoile, et développer la résilience à l’absence.

En passant je regarde autour, l’Autre est là, tapi partout sur les surfaces visibles et invisibles, et re-découvre la racine du balancement qui me porte en avant. J’intègre une approche globale du mouvement, différenciée, jamais la même, la synchronisation du temps et de l’espace vient et repart par intermittence. Sans annonce aucune, j’entends Cendrillon qui freine pour arrêter son carrosse et venir me caresser les plumes…puis, je comprends qu’elle était de passage et disparaît. Toute ébouriffée, je me réveille avec ma chouette sur l’oreiller, qui, tout en me faisant des crunch crunch dans les cheveux, hulule « Antigone tu bois trop de ce thé à l’Aneth étoilé » !

 

 

 

 

 

 

 

 

Ma chouette : une drôle de fée clochette

Dans la mythologie grecque, Athena, symbolisée par une chouette, porte un casque guerrier, prête au rapport belliqueux pour protéger la ville d’Athènes. Depuis dimanche dernier, ma chouette protectrice, en carton bouilli, n’a pas changé de peau mais de chapeau, elle revêt désormais une petite cloche pour sonner le tocsin lorsque c’est l’heure. « Oui, mais de quelle heure s’agit-il ? » De l’heure de se lever, de l’heure de se coucher, non ! De l’heure de s’éveiller, de dire, d’expliquer, de se révolter avec courage et de poser des limites à l’incivilité, à l’irrespect, à la bêtise humaine, et d’agir, oui ! D’ailleurs, ma chouette qui voulait des yeux pour regarder le monde et les Hommes, a baissé pavillon, son oeil gauche se ferme progressivement. Elle m’a dit « je préfère perdre la vue plutôt que d’être confrontée à cette réalité qui n’est pas la vérité humaine que j’imaginais à travers nos conversations nocturnes ». Et elle a ajouté « Antigone, tu as bien fait de m’opérer car je sais maintenant. Il m’a fallu voir pour comprendre ».

Ma chouette, par ses propos et sa présence, me rappelle que rien ne cloche pour nombre de mes congénères, pour eux, jamais d’introspection, tout va bien puisqu’ils ont ce qu’ils veulent. Ainsi, « comment va le monde et ce vers quoi il tend, vers quelle civilisation future » serait une question métaphysique qui n’intéresse que quelques uns, l’apanage d’êtres pensant qui naviguent dans l’océan de l’inutile. Sans ma fée clochette, je ne crois pas que « le terre serait bleu comme une orange » et je sais que la vie perdrait son sens, celui de tourner comme un triangle, jamais stable, mais avec toujours un pied pour ne pas perdre l’équilibre.

« La terre est bleue comme une orange
Jamais une erreur les mots ne mentent pas
Ils ne vous donnent plus à chanter
Au tour des baisers de s’entendre
Les fous et les amours
Elle sa bouche d’alliance
Tous les secrets tous les sourires
Et quels vêtements d’indulgence
À la croire toute nue.

Les guêpes fleurissent vert
L’aube se passe autour du cou
Un collier de fenêtres
Des ailes couvrent les feuilles
Tu as toutes les joies solaires
Tout le soleil sur la terre
Sur les chemins de ta beauté. »

Paul ÉLUARD L’Amour la poésie 1929

Quand ma chouette me joue des tours

Ce matin, ma chouette voulait voir les choses de plus près, elle ne supportait plus de voler dans le flou. Pourtant, je lui ai dit que sa vision de myope présentait des avantages mais elle s’en fout, ma chouette, elle pense savoir que c’est mieux ainsi. J’ai sorti ma trousse de chirurgien et je lui ai greffé des yeux de poupée et le tour était joué, sauf que l’opération n’a pas suffit. Elle a ajouté une fois les yeux ouverts, et frétillant comme un papillon : « oui, mais sans cœur, je ne verrai pas complétement ». « Explique-moi, qu’entends-tu par là ? » lui demandais-je. « Mon cœur est en carton bouilli, or je bous d’impatience de l’écouter battre et de le voir aussi ! ». « Mais, tu ne pourras le voir, lui répondis-je, il joue à cache cache avec la réalité ! ». Elle m’explique que c’est pour se rapprocher des humains, être émue et vibrer comme eux, simplement, rien que pour vivre un peu, à leur manière. J’ai tenté une autre fois, et en vain, de lui expliquer qu’elle aussi était en vie, dans mon imaginaire et que c’était cela l’essentiel. Et puis, j’ai compris et, je lui ai fabriqué un cœur, tout neuf, et pour couronner le tout, j’ai appris les bases du métier de modiste et je lui ai designé un petit chapeau, pour qu’elle puisse garder ses drôles d’idées dans sa boite crânienne et qu’elle ne s’envole pas de si tôt. Car avec ma drôle de chouette, nous rions beaucoup et ça se voit.

PS : elle porte haut son coeur sur son petit buste, peu importe, la greffe a pris, et ses yeux de fée semblent veiller sur le nid d’Antigone.

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Bas la patte, « touche pas à ma moustache » !

L’épopée pop de ma vie vient de mon panache et de mon héritage capillaire. Il semblerait que ma coupe de cheveux de playmobil m’aide à voir les choses du côté rose de la face pour ne pas dire de la fxsse ! A la recherche du look le plus ringard, je convoque la princesse Leila, pour qu’elle me donne des cours de bigoudis. J’ai l’impression d’avoir 2 macarons de chaque côté de la tête. A la fin de la séance, elle me dit vouloir rentrer en stop, sur un solex d’emprunt, et me laisse les clés de son engin aéropède. Sans connaître le mode d’emploi, je m’y installe et lance les fonctions de recherche du GPS. Les hélices enflent et me soulèvent la moustache. Un petit chat vient mettre sa patte sur mes poils. C’est le début du week-end, l’heure est à la gaieté pour certains êtres fiers du monde arc-en-ciel, et à la diversité de l’inutilité foisonnante pour Antigonegone. L’oeil rivé sur mon tableau de pilotage, je lance la commande « détachement » du réel et ingurgite un jus d’ange orange. En altitude, la terre se réduit, je bas des ailes et me caresse la moustache.

J’ai rêvé de la lune

Je ne confonds pas, je suis à fond dans la recherche de sens et de clarté. Et pourtant, cette nuit j’ai rêvé de la lune et j’avais les pieds sur terre ou plutôt j’étais allongée sur un lit. Le rêve fait vivre mais vivre n’est pas un rêve, c’est une réalité où le rêve est possible. La nuance est un sujet permanent. Ainsi, j’ai rêvé de la lune ne recouvre pas le même sens et la même portée que j’ai rêvé de ta lune ! L’un n’exclut pas l’autre…

La vie réserve bien des surprises, et il est préférable de rester éveillé pour ne pas passer à côté des lunes et de ses quartiers, été comme hiver, seule ou accompagnée !

Souvent, je pense à Diogène, qui a osé dire à Alexandre Le Grand « ôte toi de mon soleil » alors qu’il vivait en ermite dans son tonneau et qu’il avait eu l’honneur de la visite du fils de Philippe de Macédoine. S’approprier un astre devant un héros solaire, c’est culotté ! Ce soir, à mon tour, j’ose dire « ôte-toi de ma lune » aux perturbations atmosphériques qui circulent dans le ciel et aux étoiles trop poudrées de particules fines.

 

Herbe ravélienne 

Je bois de l’orge grillée, un breuvage tout droit sorti du pays au soleil levant. Je m’hydrate, je me rafraîchis, allongée sur le parquet, telle une herbe presque sage, au milieu d’un courant d’air.

Il fait plus de 30 degrés celsius dans le nid, je cuis, et je m’évapore. Tiens je fume du bulbe… J’agite mes doigts de pied en guise d’éventail et je travaille ma souplesse. Avec les dents, j’ai enlevé mon duvet d’oiseau des villes et remplacé mes plumes d’hiver par mon feuillage estival.

La brise du soir me soulève les terminaisons nerveuses, je frise, j’écoute Ravel, et je me sens poussée, par une ombre, j’avance dans une barque sur l’océan. Il neige, la tristesse des anges me couvre de son manteau blanc.

L’été est une possibilité, la réalité est ce que je veux bien croire et vivre.

Et si on ne passait pas sa vie à passer à côté de la vie ?

Ce soir, j’écoute mes idées bouger, s’éveiller, me bousculer, elles iraient bien de l’autre côté du mur crânien, faire des choses, transformer en réalité leur vision du monde, mais en même temps, elles sont très bien au chaud, à oser des circonvolutions sans queue ni tête, à faire des loopings qui ne servent à rien qu’à imaginer un autre monde possible. Et plus les chemins seront ouverts, sans balise, ni tambour, et encore moins de trompette, et plus mes idées appelleront d’autres idées et enfileront des perles. Et alors, au moment de la trouée (du mur), je mesurerai d’autant mieux l’importance, du passage à l’acte, de mon choix, de la signification des gestes, du silence et des mots, de la nécessité d’apprendre à apprivoiser l’Autre, à suivre aussi ses chemins, pour partager un espace et un temps communs, pour vivre et s’émerveiller, sans passer à côté de la vie.

Mes idées, je les regarde sans les voir et leur raconte des trucs, des histoires, elles en sont toutes choses, moi aussi. C’est drôle, d’être en compagnie de soi-même, fesses contre fesses. Je me dis, tiens, c’est énorme, c’est inouï, je suis libre, solitaire mais accompagnée. Je suis habitée de régions sans frontières, je ressens des vas et viens grâce à une nourriture intérieure que cultive un lutin (mon cerveau droit) qui aime ré-inventer ce qui est pour se sentir encore plus vivant. Je n’ai pas besoin de carte, de GPS, ni de connaissances météologiques marines ou terrestres pour m’y inviter. J’ai juste besoin d’un peu d’énergie pour saisir les ouvertures que me tendent mes pensées étoilées. Elles se renouvellent en permanence, aussi vite que je perds des neurones, mais leur racine est profonde, comme ma bizarrerie.

Tiens, la lune est tombée dans la mer de la tranquillité, c’est bientôt l’heure des 12 coups de minuit, Cendrillon ne passera pas, j’ai un peu chaud aux doigts et mes idées font toc toc tout bas.

Un drôle de cycliste

Le tour de force de ce cycliste, pas comme les autres, c’est de cloper tranquillement, en mode arrêt, à contre-sens, rue de Turenne, à l’entrée de la place des Vosges, un dimanche après-midi. Il se laisse regarder, photographier, il sait ce qu’il fait. Même sans toucher à son gouvernail, il tient son cap, et rit fort derrière sa barbe.

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De la légèreté de l’oeuvre sculptée

Parfois, on veut du lourd, du consistant, du roboratif, et puis, à d’autres moments, on sent l’envie du léger nous gagner, celui du vide qui remplit, de l’éphémère qui s’insinue sans peser. En avançant la tête, je scrute, et je déroule les fils de mon cerveau. Je tisse un projet sans dé ni hasard, une histoire mixte entre le virtuel imaginé par mes lobes connexes et les histoires vécues que conservent mes synapses. J’aperçois un nuage d’électrons aiguillonnés par un temps orageux. Je me perds, je perds mes repères, je ne sais ce qui se passe. Comme dans le 5ème élément, je circule dans les airs, en conduite automatique. Je fonce, j’accélère, j’en ai les cheveux hirsutes. Les routes infinies confinent à la monotonie. Alors, je stoppe mon véhicule, au milieu du ciel, je crois, puis je m’assure que le vide saura porter mes pieds. Je découvre les lieux, ils ne délivrent pas de message. Je me penche et me rapproche d’une fleur, en bourgeon, sortie, toute frêle, de l’espace, irréductible à l’instant d’une vie humaine. Je l’observe, je bleuis, je me confonds avec le ciel, je me transforme en fil de fer et me vide de ma substance, pour ne faire qu’un avec cette expression de la nature. Sa résistance me donne à rêver, elle a repoussé les représentations de la réalité et de la liberté, hors des grillages et des sillages, et s’offre, comme une invite, à croire à une autre forme de l’être, en apesanteur, et de l’amour, désincarnée, sans visage, poétique comme cette oeuvre sculptée de Pauline Ohrel, exposée à la Mairie du 17ème.

 

Incognito hi hi ou oh oh

Parce que la nuit tous les chats sont gris, je deviens souris, et je miaule, en silence, en remuant mes moustaches. Croisant le regard d’une inconnue en kimono, je lisse mes poils, et les enroule autour de ses bigoudis, avant de fermer les yeux, les joues fardées par l’agitation de mon sang vendômois. Je l’entends fouler le sol, et se rapprocher de moi avant de m’envelopper, corps et âme, à l’intérieur d’une étoffe, or et pourpre, sertie de soie noire. Sans sortir de mon songe, emprunte d’une humeur ombrageuse, je me dirige vers un espace, situé dans l’ailleurs, un moment de vertige, qui se compose d’une force fantomatique. En croyant fuir le réel, je me sens encore plus attirée par cet être d’os et de chair, dont je sais si peu, car son visage tait son essence. Je déborde puis, je bloque la réaction en chaîne, car je ne veux pas d’un raz de marée qui me mettrait les quatre fers en l’air. Je m’appuie sur ma structure inférieure, mes double pattes, pour rester posée sur terre, et en même temps je mets de l’huile sur mon petit moteur à explosion qui m’aide à battre des ailes. J’apprivoise mes vibrations et évacue mon trop plein d’énergie. Je ne sais faire face à la beauté, elle me met à nue, comme une souris, ou un petit rat de l’opéra. Je me hisse sur mes pointes, sans tutu, et je ferme le rideau, car privé de ma vue, l’incognito reste un mystère, une respiration nécessaire qui me fait me sentir vivante.

 

Antigonegone aux pieds plats…pas raplapla

Sur un chemin vicinal de la capitale, en ce 1er mai 2017, une semaine avant l’échéance clé du 2ème tour de la présidentielle, j’avance au coeur de l’indéfinissable, un territoire en re-conquête, un pays du doute, en pleine mutation, que d’aucuns, dont je fais partie, appellent la République Française, et sont fiers de son Histoire, et de son influence sur nombre de pays, lorsqu’il s’agissait de défendre la démocratie. Peut-être est-ce une utopie, à moins que ce ne soit une lubie d’une vieille bourgeoise de la grande ville, trop helléniste et vernie par la vie ? Quel que soit le jugement d’autrui de l’état général de la France, je continue à croire que notre République est plus qu’un système moribond, elle revêt, encore plus aujourd’hui, les ressorts d’un renouveau démocratique, soucieux d’offrir une place à chacun dans son Histoire collective, aujourd’hui et demain !

Déterminée, je pose et dépose mes pieds plats d’Antigonegone sur le sol et les murs, avec en moi, logée loin, en profondeur, une volonté d’agir pour mieux être, être présente au monde, car je la défendrai, cette folie raisonnable, cette envie qui confine à la nécessité, celle de se rassembler, et de s’unir, femmes et hommes, différents de par nos cultures, nos religions, nos convictions et nos générations. Car, oui, aujourd’hui, il n’y a qu’une voie possible, celle qui conduit à la paix, à la victoire sur l’intolérance, au partage des idées et des intelligences, dans le respect de l’Autre, celle de l’Humanité, une et multiple, une et indivisible, une qui sait d’où elle vient, sans renier son Histoire, qui va ailleurs, et se nourrit de l’ailleurs, sans perdre son âme et sa singularité.

Etre au 21ème siècle, c’est vivre, les pieds ancrés sur terre, sans avoir peur des autres galaxies, et du trou noir, c’est avancer, oser et rompre avec les combats d’arrière garde, les clivages surannés. Il n’y a plus de territoire à perdre ou à gagner, la France est mondiale, en réseau, reliée à l’univers, il n’y a donc pas d’autre choix que de devenir citoyen de la France, européenne et universelle, tout à la fois.

En marche, remontons nos manches, et re-construisons notre manière de vivre ensemble, sur la base de règles, bien sûr, car sans engagement ni devoir, pas de droit et encore moins de liberté et d’avenir.

Au pays du son, l’Ane est, donc, j’écris

C’est le printemps, l’heure est au changement, je déménage. Un sac plein de cet air de ne pas y toucher, une puce dans le dos, et un appareil photo dans les poches de mes yeux, je quitte la maison. Le vent balaiera les traces de ma vie fugace, en laissant un livre blanc. Par la cheminée, je m’évapore, il pleut sous le parapluie, mais je n’ai pas pris l’eau car je me suis fait manger par la baleine FN. Berk, ça sent la putréfaction avancée dans sa drôle d’habitation. Heureusement, j’entends les notes qui grattent le ciel et une respiration profonde et asthmatique du monde. Allongée dans sa mâchoire, je ne me laisse pas impressionner. Elle tire la langue, et sur son toboggan de muqueuse nauséabonde, je me liquéfie sans tambour ni trompette. Ouf, je respire, l’heure du pire est passée. Je saute sur les toits, pour me rapprocher de la lune et je funambulise sur un fil imaginaire, entre des pinces à linge, légère, et pleine d’espoir. Un jour bientôt, d’un coup de plume, le poète étouffera la folie haineuse des extrêmes. D’ici le 7 mai, au pays du son, l’Ane est, donc j’écris.

Comment je suis devenue mannequin ?

Pour épater mes ami(e)s, j’ai raconté que j’avais épousé un mannequin. Ils se sont extasiés, waouh, un mannequin, il doit être beau…Oui, ai-je répondu et pas seulement ! Très étonnés par cette annonce, je les ai sentis curieux de pouvoir le rencontrer. Je leur ai dit, rdv place de Furstenberg et vous saurez de quoi il a l’air et plus encore. 

En réalité, il a pris ses quartiers dans la vitrine d’un antiquaire, et il m’attend. Tout en bois flotté, lisse au toucher, il ne me laisse pas de marbre. Il ne demande qu’à me prendre par la main, depuis que je lui ai demandé la sienne. 

Par mimétisme, j’ai le sentiment d’être devenue une antiquité dans un cabinet de curiosités, et de regarder les choses avec l’œil de celui qui se laisse regarder pour mieux regarder l’autre en train de se regarder. 

Des miroirs à l’infini, c’est ce que renvoie mon nouvel état d’Antigone. L’écriture expose certes, elle gratte aussi sous la surface et propose un choix illimité de possibilités d’histoires qui protègent. 

Tel un mannequin, je me mets en vitrine pour mieux observer le monde, le montrer autrement, animer les objets et leur donner une âme, réveiller la belle endormie et transfigurer le regard. 

Mon âne atomic

Mon âne n’a pas froid aux yeux, ni nulle part ailleurs car il est poilu, ce qui lui procure un avantage en ces temps glaciaires. Il a fier allure, dans la rue ou dans le nid. Pour tracer son chemin, il met son nez dans le creux du vent, il  remue son popotin tout en faisant tourner sa queue et ses oreilles. A l’approche des jours prochains, qui avoisineront les -10 degrés celsius dans le massif central, -7 en Lorraine et – 6 en Ile-de-France, il va baisser sa consommation d’électricité pour ne pas trop tirer sur le réseau de distribution géré par Enedis (ex ERD-F filiale d’EDF), et surtout il a la ferme intention d’arrêter de poster des âneries sur le blog d’Antigonegone. En même temps, il me dit qu’il y en a d’autres qui pourraient aussi s’abstenir d’encombrer les réseaux sociaux…de l’autre côté de l’Atlantique.

Mon âne, il joue avec les atomes, comme avec des billes. Il aime créer des réactions en chaîne quand une bille en touche une autre et ainsi de suite. La fée électricité l’observe et sourit. Elle l’a surnommé « l’âne atomic », rien à voir avec « atomique Anne ». Mon âne atomic rêve mais Areva ne fait plus rêver. Mon âne atomic aime le double X (groupe de pop music qui vient de sortir un excellent album) mais n’a pas fait l’X.

La face obscure de mon âne atomic c’est lorsqu’il se déshabille et qu’il me montre son anatomie. C’est un instant étonnant, de dépouillement, un conte en vrai, car sous sa peau d’âne se cache une princesse qui n’en pas l’allure et qui n’est pas poilue (quoique). Cette femme aime raconter des histoires qu’elle imagine en ouvrant grand les oreilles et en dépliant ses yeux en amande, une manière à elle de mieux comprendre d’où viennent le vent et les atomes.

Vague de froid, adoptons les bons gestes

Une besace et une chouette 

Ouvre ton sac Anti-Antigone, contrôle des pirates de la Vigie ! Rien de spécial, la routine. Outre le fait que je ne vous dois pas que la lumière, chers Mesdames et Messieurs, de la police ou de l’Armée, vous trouverez dans ma besace des objets « éclectiques » peut-être radioactifs, autour, voire au-dedans. 

Une carte navigo pour voyager dans le métro. Ne prononcez pas ligne 13, ca porte malheur, j’en connais qui se sont transformés en crapaud. Un carnet pour écrire des mots et évacuer le trop plein de rien. Une carte d’identité pour circuler plus loin que dans la Capitale et la banlieue. Et pour le ciel, y a pas de permis ? Hormis celui d’avoir existé ? Des cartes de fidélité et d’infidélité et une CB avec une puce dans le dos qui gratte mon banquier virtuel. Une nonochette pour la fée qui cloche, et un livre barré (orfeo de Richard Powers, un roman US génial, au carrefour d’une thèse sur la musique contemporaine et l’incompréhension qu’elle suscite et la recherche en biologie cellulaire au pays de la psychose d’une possible guerre bactériologique).

Après le sac, je fouille dans ma tête et la surprise est de taille, une chouette sort de mes pensées floues. Elle hulule et me demande de me laver les dents avant de rejoindre le nid. J’ai des plumes sur les lèvres et je perds mes dents. Elle m’a endormie par son regard hypnotique. Je me vois en train de rêver avant de m’envoler sur le toit avec la chouette qui sourit et qui exhibe mes dents dans son bec. Mais que font les pirates de l’air ? Ils trient la purée de pois et avec les particules fines, ils jouent aux billes dans le ciel…

 

Fumeuse et amoureuse des fleurs

Dans ma tête, j’avoue que c’est parfois, enfin, plutôt quasiment toujours, embrumé. Je m’auto-pollue, en produisant du smog toute seule mais j’irradie aussi, car combustible je suis et mon noyau de géranium 3O8 n’est pas prêt de s’éteindre. Avec un peu de carbone 14, on pourrait tracer mes origines … Sauf que ce n’est pas utile de passer par cette étape. Mon corps brule, et recycle, dans un circuit fermé, un composte villetrunois, non disponible sur étagère ou sur les sites web.

Respirer les fleurs, les petites fleurs des champs, c’est ma came, mon calumet de la paix intérieure. Grâce à leur fragrance, je me décompose, et je fume du ciboulot. Je rêve les yeux ouverts, je marche en apesanteur, je vis sans différencier l’imaginaire du réel. J’invente ce que je vois, je vois ce que j’invente. Je sens des fleurs qui poussent dans mes doigts et je fleuris aussi au-dedans. Sous ma peau, je trimballe des coquelicots, des boutons d’or, des violettes qui me poussent à être moi, sans traitement superfétatoire, juste un peu de bouillis bordelaise pour que je me protège contre la pluie et les nuisibles.

J’apprends de la fraîcheur du matin lorsque l’hiver me réveille de sa gelée blanche.  J’apprends de mes erreurs lorsque je beurre mes tartines et que je perds mes idées au fond d’une tasse de thé. J’apprends du regard des autres quand leur visage me dévisage. J’apprends au fil des saisons et de la repousse. Je me taille en douce quand ça pique.

Pour dépasser la ligne d’horizon de ma carapace, je fais des pas qui ne se voient pas, assise sur un banc, une plage ou un lit. Je n’ai pas besoin de bouger pour voyager, je me consume sur place, je deviens fleur, légère, aspirée par le vent d’hiver.

L’urbaine tortue hiberne 

La pluie glacée s’est infiltrée dans Paris, les toits de zinc dégoulinent un jus gris souris. Le glacier de la rue a fermé boutique, le rideau de fer devant sa vitrine rose nous parle de l’hiver et diffuse des arômes de réglisse. Les arbres fruitiers bossent sur la conception d’une forme de bourgeons, résistants aux gelées de printemps, car ils veulent que le glacier puisse composer ses sorbets en toute sérénité.

L’esprit de la régalade me réchauffe déjà les papilles, mon chat « medor pas » boit du coca. Il rote, je lui dis, « mets la patte devant ta bouche, charlotte ! ». Il miaule et gazouille. Je crois que l’heureux animal a avalé le petit oiseau qui est sorti de mon appareil photo.

Je couds mes yeux de poupée sur mes orteils pour voir autrement le ciel et sa couverture de nuages. Posée sur un fauteuil, je ne fais rien. J’écoute le silence et la tortuosité de mes pensées vagabondes me prend par le bras pour former la ronde du temps, en boucle ouverte.

Telle une tortue urbaine, j’hiberne en compagnie de ma ménagerie qui me raconte des histoires de pluie tropicale et d’éternité de l’instant, en tirant sur un élastique.

Slatch, aïe, je mangerais bien une glace sous une pluie tropicale, les pieds dans l’océan, sur le sable blanc, tout près de Mon Captain Emily.

Sage sans vice ni visage : l’Anti-Antigone 

Pour vivre tranquille, j’avance masquée, en apparence sage, sans vice. Je joue à cache cache avec les normes sociales, les représentations, les catégories qui classent et qui regroupent, qui opposent et qui annihilent. Je suis « une bourgeoise », un cadre qui cadre avec le moule, tatouée d’un matricule, le kif pour tout individu normalement constitué.

Pour me fondre dans la masse, quand je rencontre le monde réel (plutôt fictif à mes yeux), je mets de la crème, de la poudre aux yeux, du stick pour contrer les « dick ». C’est un jeu d’adulte, du théâtre bas de gamme, trop sérieux pour être digne de curiosité. Je ne renie pas ce besoin d’être de la partie, je me sens seulement décalée. Aussi, j’avoue que cette incursion satisfait mes besoins matériels, et qu’elle ne dit rien de la face cachée de mon existence.

Barbatruc barbapapa.

Mon vrai visage, les rides qui le creusent et les fêlures que j’ai partiellement recousues, je ne les sors qu’à la nuit, en fin de semaine ou lorsqu’Antigone vient me tirer l’oreille creuse et les vers du nez. Mes yeux de poupée, ma structure d’invertébrée, mes ailes de marchand de sable, mes pieds plats, mon cœur fou, mon cerveau or et ange, ne s’expriment que par intermittence, il suffit que je regarde le ciel ou l’océan.

Sans mon masque, je respire en profondeur, j’aère les pores de ma peau, mes cellules se replacent, mon sourire se relâche, et je crois rêver tellement je suis. Je vois et je ressens des connexions entre ce qui m’entoure et mes détours intérieurs. C’est comme un seul et infini escalier qui viendrait d’avant mon arrivee sur terre et qui irait jusqu’à d’autres demains, et d’autres planètes.

Quand je suis nue, moi, l’Amour de la Vie me submerge, j’ai l’impression de voler, j’embrasse et me laisse envahir par le monde des vivants, des petites bêtes jusqu’aux bipèdes. Ma curiosité me conduit à m’émerveiller et je me sens guidée, habitée par la Beauté.

Installée dans un fauteuil de mon nid ou en traversant une rue, aussi, parfois, la mélancolie m’étourdit. J’entends les murmures de voix intimes, cristallisées par la confiance d’une confidence qui scelle nos solitudes. Je me surprends à ouvrir des portes secrètes, muette et en miette, comme la dernière femme de Barbe Bleue, et ainsi à ne pas être en mesure de dire au revoir aux gens que j’aime, ma gorge se noue (pour mes parents et mes amis en particulier). Je goûte, les yeux en l’air, happée par les souvenirs, les odeurs et les saveurs de dîners passés, scotchés à mes paupières, par un parfum arrosé de nectars fleuris.

A 23h, le 6/1/17, je suis là, avec mes vices et ma vertu, dans l’instant, comme un bout de puzzle qui résulte de plein de bouts de vous, de nous, et ce truc là, c’est Antigone. Il devient de plus en plus ferme, dense, il danse de lui-même, il se nourrit aussi de vies lues dans les livres, moins fictives que le réel des représentations sociales.

La liberté d’Antigone, c’est un ouvrage, un tissage que je défais en rêve, comme Pénélope, et qui enfle, un peu plus, à mesure que je me (dé)ride, au pays des masques et des bergamasques.

Mes yeux louches 

Une femme avertie en vaut deux. 

Une amie, dotée d’une hauteur de vue, puisqu’elle crèche au Sacré Cœur, a pensé à ma vue basse, en chinant des yeux bleu ayant appartenu à une poupée, et me les a offerts, car elle savait que j’en ferai bon usage …Certes, c’est un cadeau incongru, qui m’a bien fait marrer mais c’est aussi un atout génial pour développer ma vision périphérique sur  360 degrés et aiguiser mon regard du-dedans.

La greffe de cette paire d’yeux sous mes cheveux, m’assure une certaine discrétion. Et comme ces ouvertures visuelles sont bioioniques, elles revêtent donc un pouvoir  de voir sous les poils et la peau.

De nouveaux yeux pour voir derrière les apparences. D’autres yeux pour saisir ce qui est. Des billes oculaires d’une grande acuité pour se rapprocher des profondeurs de l’être. Des yeux artificiels pour rêver au bleu du ciel quand les autres, natifs, se concentrent sur le réel. Autant de qualités nouvelles pour devenir une gentille poupée ! C’est un vœu qui ne tiendra pas (comme les autres) mais osons y croire d’un œil car c’est le début d’année.

Sortis de leur fonction première, les yeux d’une poupée peuvent vivre une seconde vie. J’ai d’abord éclaté de rire au moment de recevoir le cadeau, puis ce soir il me fallait écrire sur le caractère essentiel de cet objet en apparence  « inutile », et décalé. Ma curiosité s’est animée. L’enfance a rejailli. Ces yeux sortis de la poupée m’ont sortie de moi. Le caractère utile de l’inutile tient au fait qu’il nous rend encore plus vivant, nous-mêmes, heureux et nous détache du vrai superflu, les contingences du quotidien, …. 

« Rien que pour vos yeux », je reconnais aussi qu’on ne voit bien qu’avec les oreillettes du ventricule.

Il était une fois une fée crabossée 

Sur terre mais pas que, il arrive qu’on rencontre des fées. Parmi elles, je ne parlerai que de la fée qui me fait un drôle d’effet car elle semble être le fruit du croisement entre la fée carabosse et d’un crabe cabossé.

Elle sourit aussi loin et long que tous les océans confondus. Elle ne joue jamais du pipeau sauf avec les idiots pour ne pas écrire un gros mot. Elle aime la musique, la musique et la danse, la danse des mots, les mots qui rendent vivants, le vivant de la nature, la nature des hommes, les hommes natures.

La fée crabossée en pince pour ce qui tourbillonne son corps et son esprit. Elle est montée sur ressort, elle est une toupie qui a du toupet, elle tourne comme un derviche et son jus de fée semble sorti d’une centrifugeuse qui viendrait d’une autre planète.

Quand je croise son regard, je lis une peinture aborigène au fond de ses yeux profonds et ténébreux. A trop la regarder, je tourbillonne sur mon axe et tel usant d’un paralax je change d’axe pour me retrouver dans les creux et les pleins de la mer, au milieu des vagues et des crabes. J’entends alors le chant des sirènes et je me pince pour m’assurer que je n’ai pas rêvé…

« Ojama shimasu » * Marie-Claire

Marie-Claire est libraire 2 rue Marie de Luxembourg à Vendôme.

Elle est passeur d’histoires entre les auteurs, les conteurs, les poètes, et les lecteurs.

Que serait notre monde sans libraire ?  Un monde possible si on n’y prend pas garde. Être libraire, de surcroît en Vendômois, est un acte de foi et de folie.

Quand je me rend chez Marie-Claire, je viens respirer un autre air, libre, cet air libraire tapissé d’odeurs de papier et qui tisse des espaces, des temporalités, des liens, entre notre vie d’ici et des univers infinis, sans frontière, là-bas, ailleurs.

Marie-Claire est « totalement » investie dans son travail de libraire indépendante. Elle ne conseille pas les livres dont on parle sauf s’ils lui ont plu. Si vous lui demandez ses coups de cœur, alors là, c’est le début d’aventures inoubliables.

A titre d’exemple Marie-Claire conseille en ce moment « Notre château » d’Emmanuel Régniez aux éditions le Tripode un 1er roman. C’est un conte fantastique, du 21eme siècle. Une histoire qui se passe hors du monde dans un château appelé « Notre château » par la sœur et le frère dont il est question dans ce livre rare. Leur seul lien avec le « vrai » monde est associé au rituel du jeudi matin lorsque le frère quitte le château et se rend à la librairie de la ville pour répondre à la soif de lecture de sa sœur et aussi la sienne. Un trouble va gagner le caractère paisible de nos hôtes et le climat psychologique va devenir angoissant…C’est un livre différent par le style, qui creuse des sillons et des ellipses mystérieuses, de par la narration musicale, son rythme qui confine à de la poésie en prose et le propos, très decalé qui fait du bien !

Ses choix de libraire sont effrontément libres. La liberté me semble se nourrir de cet échange, de ces choix affirmés en marge du courant de pensée unique. Oui ça donne des ailes, de faire des tours et des détours à « page 10/2 ». Dans ce lieu « notre librairie » on se sent libre dans l’air à défaut d’être libraire.

Ses autres conseils du moment portent aussi sur « Continuer » de Laurent Mauvignier, la claque il faut le dire, c’est un récit qui raconte une rupture au sens de l’éveil, de reprendre goût à la vie, grâce à une mère qui ose le pari fou d’emmener son fils faire un trek à cheval au Kirghizistan (écriture description et dialogues ce récit est Grand) ; ou encore « le Kimono de Neige » de Mark Henshaw admirablement traduit et complètement dingue poétique et captivant sur les méandres de l’âme humaine. Ces livres emmènent loin, je les ai lus d’une traite et je les porte parce qu’ils rendent livres ou libres c’est pareil…

Je voudrais terminer par le 4eme mur de Chalandon et cet extrait d’une pièce d’Anouilh « Antigone c’est la petite maigre qui est assise là-bas et qui ne dit rien ».

Merci Chère libre dans l’air Marie-Claire.

  • je vais vous déranger honorablement

Antigone Gone (with the wind)

« Tandis que j’antigonise », à la fois Gone et Antigone, pour et contre « y aller », je revendique ma filiation avec Janus.

Je, et une Autre, étrangère et moi-même, je libère mon regard derrière la ligne d’horizon et protège mon oeil sous ma paupière close. Je me rapproche de ce qui s’éloigne.

De la photosynthèse d’une orange, j’extrais des pans de pensées et dessine des traits fragmentés. Au cœur de la nuit, mue mutante muette, je me laisse happer par un sentiment de profonde légèreté. Comme si le temps s’évaporait. Et quand vient le jour, je debloggue pour vivre les choses de la vie.

 

Manteau gris orange : enfilons un tutu et tutoyons les anges

Ce soir je deviens souris. Je suis en vrac à Paname, tellement l’Art me submerge. Help il me faut un jus orange pour irriguer mon cerveau. J’enfilerai bien un tutu pour tutoyer les anges. Je chanterai bien la pluie. Je ferai bien comme Mary Poppins. Je ne suis pas née 42th street et pourtant pour moi la musique et la danse vont de pair.

Swing & sing, c’est la nuit, « tous en scène » avec Fred et Ginger.

Claquettes pirouettes c’est le fête !

Rêves d’Asie et de fantaisie

Voyages du côté du soleil levant

Ma famille de sang est sédentaire, reliée, attachée à la terre, des hectares arables sis au centre de la France, le centre du monde lorsque j’étais enfant. C’est une famille de paysans, des artisans amoureux de l’argile et de ses pierres de silex. La terre pour nous, c’est sacré, un socle, un enracinement de la certitude d’être là pour quelque chose, prolonger et transmettre les ressources terrestres héritées de nos ancêtres ou acquises grâce à la force de travail de mes parents et à leur esprit d’entreprise ouvert, attentionné.

Nous sommes bien sur terre, a contrario le pied marin, ou l’apesanteur, ce n’est pas trop notre truc. Pourtant, nous aimons la nature, sous toutes ses formes, d’autant que la petite Beauce, semble privée de ses beautés. La nature y semble resserrée, présente à des fins économiques, un grenier à blé nourricier. Elle ne s’offre pas à l’oeil d’instinct. Alors, nous sommes allés, ailleurs, chercher cette beauté dans des fantaisies, à notre portée, en fonction des générations. Mes parents ont su développer leurs passions au plus près de la maison. Le jardin, son potager, la Guimanderie le nom de la maison, son aménagement, son ouverture sur l’extérieur, les terrasses, les fleurs, les arbustes, les arbres, la moquette verte s’étend sur près d’un ha. Nus pieds, la tête pleine d’envies et de savoirs, mes parents ont su construire leur univers, entre l’aviation, les antiquités, et surtout l’Amour de son prochain, et la famille resserrée en son noyau, la laïcité était notre crédo.

La génération d’après mes parents, mes frères et moi sommes sortis du nid dans un rayonnement plus ou moins large. Mon frère aîné a vécu dans les environs de Paris, c’était loin alors pour moi. Il a choisi une autre vie que celle de la terre mais en même temps, pas si éloignée, car il a évolué dans l’agro-alimentaire et il a rencontré une fille de paysans, devenue sa femme. Mon frère  cadet s’est expatrié en Afrique avec sa famille, sa femme est issue aussi de ce secteur. Plus tôt sur la carte du temps, peu après la mort de Mao, il a fait son stage de fin d’étude en Chine qui ne s’était pas encore éveillée. Lui aussi a choisi une autre vie que celle de la terre mais les télécoms ça permet de relier les hommes entre eux d’où qu’ils soient sur la planète. J’ai fait mon 1er voyage à l’étranger à 14 ans en Grèce au plus près du berceau de notre civilisation. Depuis, je navigue entre la capitale et Villetrun, en m’écartant peu de la terre, et en essayant d’apporter un peu plus que la lumière.

Comme des grandes pousses, mes neveux voyagent de plus en plus loin, à titre personnel ou professionnel. Ils aiment l’Asie, la fantaisie, ils ont compris que la vie c’est quelque part entre Villetrun nos racines, les océans, et le ciel, et que nos yeux bridés et profonds, qui viennent de maman ont su se conjuguer avec le caractère passionné et breton de papa.

Bon vent, mousses qui roulez sur vos couloirs terrestres et célestes, la fée a remisé son balai, mon Captain veille et je crois que l’heure est venue de voter aux primaires en qualité de primate ailé qui croit encore à un monde meilleur, sans frontière, débridé…

 

 

 

Antigone n’est pas de sortie (68)

Ce soir je me pose…j’en vois qui sourient, moi aussi !

 

Ce soir je me pose, et me dépose, bercée par l’air du temps qui s’est infiltré par le toit. J’écoute, je regarde, je sens que le nid se remplit d’un vide qui ne l’est pas, je mesure le côté plein du « gone » d’Antigone. Ce n’est pas un polygone, mais la politesse d’une forme imaginaire. Je la mesure à l’aune d’un instrument absent des comptoirs ou de la géométrie. Elle n’est pas très lisible, elle se laisse entrevoir, son dessin n’est pas très net net net. Pour la saisir sur les bords, je lui parle dans un langage qui flirte avec le vertige. Et progressivement, Antigone s’éveille, se déplie, déroule ses bigoudis, et aère ses yeux tout remplis d’embruns. Petit monstre marin parisien, elle enlève sa carapace, d’un coup de zip, puis se plonge sur son tapis de plage, presque nue. Ce qui la protège ce sont ses grains de beauté sur sa peau car ils poussent pour mieux repousser la nuit et le jour. Ses grains communiquent entre eux et lui murmurent des histoires, des idées bizarres. Et quand la connexion est à son zénith, une muse vient lui titiller le museau, et sa souris s’amuse de son jus de cerveau. Avant que la fatigue ne prenne le dessus et que sa tête ne s’embrume, elle prend son manteau, et met son côté « gone »en avant comme une lampe de poche. Un tour de clé, elle part goûter le sirop de la rue, et croise ceux qui sourient, et elle se dit, moi aussi !

PS : ce soir c’est un peu spécial…c’est mon 68ème article, des milliers de visites de France, du UK, de Thaïlande (merci Charles :-))) s’y sont retrouvés. Ce blog, je l’ai créé le 28 août 2016, le jour où nous sommes allés à Rock en Seine avec Ph. Notre pH n’est pas resté neutre cette nuit-là…car il a fallu se désaltérer tellement il faisait lourd, même après minuit. Nous avons retrouvé nos yeux d’enfants, et notre sourire « banane », en écoutant et en regardant Sigur Ros, un groupe islandais qui vous laisse sur place en vous imprimant l’ineffable sur votre mémoire avant qu’elle ne s’efface (cf. mon article sur le sujet).

« La photo en une » de ce 68ème article, qui démultiplie par l’effet de la boîte de Kusama le reflet des diodes et de mon oeil qui frise, c’est un autre fragment de ma mémoire, un détour du côté de la Lorraine avant le 15 août du côté de chez Catherine et qui a donné lieu à plusieurs articles.

A bientôt, pour des nouvelles or et ange, du jus de bitume, des histoires qui tombent du nid et qui se plaisent à zigzaguer entre le ciel et des bouts de l’ailleurs. Soyons fous, laissons passer la lumière, posons-nous, déposons notre carapace.

Spéciale dédicace à Mon Captain qui répond à ma prose par des poèmes en rimes, sans frime, juste en étant lui-même car c’est la meilleure façon d’être…. Vive la Bretagne !

Sleep tight, don’t let the beds bugs bite, je vous embrasse.

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Âne : un autoportrait « vérité »

Âne est plus ou moins poilue, elle perd ses poils et est au poil en « bonne » compagnie.

Âne a une bonne vue, c’est pourquoi elle conduit et pratique l’auto-dérision.

Âne préfère l’herbe au bitume, ou l’inverse. L’hiver, elle boit des tisanes pour éloigner le rhume. L’été, elle évite le soleil car sa peau craint la surexposition.

Âne aime la mer, les sirènes, et les petites algues, parfois elle rêve qu’elle nage dans l’océan.

Âne préfère la nuit au jour, ou le jour à la nuit, tour à tour, et puis s’en va, retrouver son espace qui n’a ni bordure et alentours.

Âne crâne sauf lorsqu’elle sort avec ses oreilles dépliées.

Âne est libre de ses quatre pattes, quand elle vole, elle fait des pirouettes avant de retomber sur ses pattes.

Ânnette, Aneth, Animae, Âme, Anne

Grains et graines sous le soleil d’automne

Le petit animal, que je suis, trimballe un grain de sable dans son œil. Ce morceau brut et cristallin s’est extrait d’une plage de Bretagne. Il a fait le chemin jusque dans mon globe gauche. Ce grain breton donne à mes larmes un goût iodé et salé. Il distille aussi un goût de miel et de caramel. Je le conserve jalousement car je vois mieux ainsi.  Les jours de marée parisienne et de grands vents entre les tours de béton, j’ouvre grand l’œil et mon grain lève le voile, et me voilà embarquée sur l’océan auprès de Mon Captain.

Le petit animal est rempli également de graines dans son cerveau, des céréales qui germent les jours de pluie ou des petits pois qui se transforment parfois en purée. De temps en temps, pour aérer ses grains et ses graines, il écrit ou il s’exprime en ouvrant le bec, et s’étonne lui-même de ce qu’il met en mots ou dit.

Pirate de l’immatériel

Voyages en roues libres

Sous ma cap de pirate, je fuis, je suis, sur mon vélo. Entre les gouttes, je me faufile, et je songe à mon vol en train de se faire, qui n’a pas de consistance, et qui ne vaut pas trois cacahuètes. L’objet du délit, saisir le temps, sans lui demander la note, car la « conta », dans ce cas, ne compte pas, mais le décompte en revanche est bien là, qui résonne, et fait splash, à chaque coup de pédale.

En cet instant, je voyage dans la profondeur immatérielle du temps, qui s’efface et qui est, alternativement, ou de manière synchrone, avant de s’effacer à nouveau et de renaître, jusqu’à s’inscrire par bribes, plus ou moins déformées, dans ma mémoire de pirate.

Je fais des loopings, ou du sur place, le temps goutte, et me submerge. En zig zag, j’avance en crabe, j’en ai oublié mon vélo. Les roues sont libres, le pirate voyage, le pirate est libre, les roues voyagent. Le temps a piraté mon vélo, mon cap est de pirater le temps, pour retrouver mon vélo et sentir les coups de pédale, réels, imprégner, mon corps et ma tête de pirate.

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Des ondes blondes à « Villetrun gum »

Du blé plein la tête

Le blé est la céréale qui a balayé mes horizons, et coiffé mes yeux, depuis l’enfance. J’étais blonde comme eux, avec des poils raides sur la tête. A perte de vue, ils se tenaient droit, jusqu’à ce qu’une brise soulève leurs crêtes, et les conduise à se balancer à un rythme régulier. A ce moment précis l’étendue jaune paille ressemblait à l’étoffe d’un océan terrestre qui semblait avancer vers un ailleurs.

Sur les chemins qui longeaient les champs, je me faufilais avec mon petit vélo orange, pédalant sans interruption, plus rapidement qu’éole, et je virevoltais dans ce paysage lunaire.

Je me souviens aussi quand on croquait la céréale, et qu’ensuite on la malaxait pour en faire un chewing-gum « home made ».  Et dire que mon frère aîné a travaillé longtemps pour le grand groupe agro alimentaire fabricant de la plus célèbre marque de gum du monde. « Hollywood » c’est super bon mais « Villetrun » gum ça le fait encore plus !

Oui, je me souviens comme ça sentait bon le blé, pendant la moisson. D’ailleurs, les poussières de paille s’infiltraient partout, et on se grattait, on n’en avait pas que dans les yeux et les oreilles, on en avait dans la tête, plein la tête.

 

Pourquoi « Antigone gone » comme nom de blog de l’Aneth nette nette pas tout à fait ?

1/ Le côté « sérieux » de l’explication

Parce qu’au-delà du mythe et de sa représentation par Sophocle dans la tragédie grecque que nous avons lue et jouée à 14 ans à Dodone, dans le texte, il existe une version d’Henry Bauchau qui relève de la poésie pure en prose.

Extrait : « Tu n’as jamais été sur la mer, Antigone, et pourtant tu es un vrai marin. Sans voiles, sans gouvernail, voici des années que tu navigues, sans chavirer, … » Oedipe

2/ Le côté iconoclaste

Because, aussi, jeu de mots. »Gone » a un rapport avec le chemin qu’Antigone va faire d’Athènes à Thèbes pour venger son père naturel, Oedipe, puis pour se battre contre la folie de son beau père, Créon, et de ses frères Polynice et Etéocle qui veulent le pouvoir et finissent par s’entretuer, et enfin pour oser enfreindre la loi en ensevelissant Polynice sans l’accord de son beau-père jusqu’à être condamnée et à en mourir…mais aussi « gone » a un lien avec le fait qu’Antigone est considérée comme folle par sa famille, ses amis, et son entourage. Donc « gone » c’est bien prendre la route, tout en étant barré, au figuré.

Donc, voilà ze explanation.

Dessins et doigté

Crayon sans poil

Dessiner, un peu, tous les jours, c’est aussi vital que marcher, aussi fort qu’ouvrir les yeux, et les oreilles à de nouvelles perceptions. C’est une série d’allers et retours entre le dedans et le dehors, ça aère des trucs, des choses, des machins, c’est une célébration du bourgeonnement qui aboutit à des champs fleuris ou en friches.

Mon crayon est parfois au poil, il dit mieux que mes doigts sur le piano ou les mots. A d’autres moments, ses poils se rebiffent et il ne sait pas dire, il n’accroche pas le papier, ou la mine n’a pas la pointe sûre. Je secoue pourtant le combustible de mon crayon, mais il ne descend pas, le coeur attend sa réaction en chaîne, et ça ne vient pas. Une histoire de trous S, j’appelle A ou W mes fournisseurs d’assemblages. Ils m’invitent à changer de mine ou à réparer mon crayon pour produire une énergie renouvelable, sans fission, sans (ef)fusion…

 

 

Au commencement

Une herbe folle de photo synthèse

Au printemps 2016, je me suis « chlorophyllisée », en sirotant de la photo synthèse, avec un objectif devant et un autre derrière l’oeil.

Mauvais temps, floraison ruinée par trop de grêle et de gel, les bourgeons des vignes et des arbres fruitiers avaient brûlé à peine éclos. Pour rester verticale, j’ai commencé à marcher les pieds ancrés dans le bitume, le crâne tendu vers le ciel, en regardant à 360 °. N’étant plus que sensations, je me laissais bercer par la lumière, les orteils et les yeux grand ouvert.

Tout ça c’est grâce à Antigone, qui ne s’est pas résignée, qui a fait face et s’est battue contre la pensée unique, l’excès de pouvoir, le non respect de la personne humaine, vivante ou morte. Elle a marché entre Athènes et Thèbes, pour honorer les siens, seule, contre tous, et ce chemin me faisait du pied. Je respirais en ayant conscience de mon souffle, et de mon corps. J’étais gouvernée par mon coccyx et (é)mue par le sentiment de naviguer en toute liberté.

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Quand au milieu d’un jardin parisien, j’ai déroulé le fil d’Ariane et vu se rapprocher l’espace et le temps, le mouvement et son onde, la parole et son sens, le son et son écho, le vide et le plein, l’utile et l’inutile, j’ai senti mon regard s’allonger, et mon cœur d’herbe folle devenir flottant.