Avec les dents, le vent

La brise caresse l’air frais de ce jour de mai. Avec les dents, le vent léger me tire de mon sommeil, il me mordille de ses canines et me plonge dans la cité de Notre-Dame. Le tissu de ma peau imprime la marque du temps et je regarde les toits, les ondulations des nuages blancs et les droites infinies que deux points relient à l’univers.

L’envie me rattache à la vie, le printemps est infini, je respire le CO2 de Paname, c’est ma came.

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De Dannemois à damne-moi : en route vers Jean Tinguely, Niki et leur Cyclop !

L’heure est à la poursuite des grèves du rail, les cheminots militent en alternance pour que les nouveaux entrants disposent des mêmes prérogatives que leurs aînés et le gouvernement n’a pas trouvé la clé du consensus, mettre la main au panier ne suffit pas. Car le statut est roi et la statue est reine voire cyclopéenne !  Du fait de l’annulation de mon train de retour, ce we je n’irai pas en Vendômois mais sillonnerai, grâce au bus de la RATP, mes gambettes et une automobile, entre la Porte d’Orléans, Montrouge et la Seine et Marne.

J’en avais entendu parler en lisant « Ulysse », mais je ne l’avais pas rencontré, or hier, par hasard, j’ai eu la chance de découvrir, hors de sa grotte, le « Cyclop », tranquillement assis, dans la forêt de Milly. Est-ce parce que la journée était ensoleillée, cet être étrange m’a fait de l’oeil. Il est né du grain de folie et de l’énergie créatrice de Jean Tinguely qui a réuni sur plusieurs années, à compter de 1969, sa femme, Niki de St Phalle et ses camarades, César, Arman, Klein…pour réaliser cette sculpture géante, en béton, métal et miroirs. Bien sûr, il n’avait pas demandé l’autorisation de construire à l’Etat même s’il lui a légué l’oeuvre plus tard, en 1987.

Le monstre sort sa langue et son oeil brille comme une pierre précieuse. L’ouvrage est protégé par un filet, là où les morceaux de miroir se décollent et se reflètent sur l’eau. Une tare indique sa hauteur, un monte charge donne la possibilité de le visiter de l’intérieur. Après l’avoir contemplé, déformée par l’actualité, je me suis laissée happer par le wagon de train de marchandises qui a fini sa course dans les arbres. Je n’ai pas su réprimer un sourire, la boucle était bouclée, la « SNCF avait choisi de dérailler » pour la bonne cause, c’est pourquoi je ne raillerai plus à son endroit…

Petit détour par Dannemois, commune à proximité et hautement célèbre, où Claude François a choisi de venir vivre de son vivant et pour l’éternité. Son cimetière est l’attraction du village, deux statues en bronze célèbrent le chanteur de Podium. Plus bas dans le bourg, Niki de St Phalle et Jean Tinguely ont investi la plus vieille bâtisse et créé nombre de leurs oeuvres. Leur fils investit les lieux de temps en temps.

Finalement, grâce à la SNCF, j’ai pu transformer un trajet par un autre et comprendre ce que « damne-moi » veut dire dans la langue du 77 et en mon for intérieur !

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Pâquerettes loin de Paris : à la campagne la moquette fleurit !

La pâquerette, au printemps, se peigne et soigne sa coupe. La tête hors du sol, elle s’aligne avec le soleil, une collerette autour de son œil de cyclope nyctalope, l’arête au milieu. Pour écouter gazouiller les oiseaux, la petite fleur s’étire en longueur, la tige enserrée sous ses talons. Incapable de les accompagner en jouant de la mandoline avec ses petits doigts, elle laisse bien volontiers la rape à sa grande sœur, marguerite. Sous l’effet de la bise, elle raconte fleurette à l’herbe folle, et entame une danse. C’est un drôle de bal, la houle la rend saoule…

Brantes, au pied du Mont Ventoux

Si demain, je renais, ce sera là-bas, à Brantes, au pied du Mont Ventoux. A 500 m d’altitude ce village a illuminé notre we. Dans ses ruelles, des maisons perchées et fermées, et au-dessus un ciel immense, avec au bout des yeux le dôme crémeux du mont Ventoux enneigé, impraticable avant fin avril. A l’entrée du village, nous y avons croisé un vieux monsieur ramassant du bois, des sarments pour se chauffer. Derrière son sourire, il portait une barbe blanche et un bonnet orange vif ! Et, puis, j’oubliais la chapelle, « la cathédrale », comme disait cet habitant à l’oeil qui frise, tout près de laquelle la faïencerie et la librairie comptaient les heures avant le printemps. Et que dire de la façade « poste, télégraphe et téléphone », elle ne ré-ouvrira pas, à moins qu’un rêveur fou propose de détourner l’endroit en « ici, règne du calme absolu, smartphone et courrier électronique s’abstenir »…

En tête à tête avec une bête à Bon Dieu

Ce matin, dimanche, une bête à Bon Dieu a eu l’audace de venir se dorer la pillule pendant la messe sur le rebord de la fenêtre de ma chambre. Elle avait déserté l’office. Les écritures de la Sainte Bible parlaient à son âme pendant que Yoyoi Kusama et son obsession des points parlaient à sa carapace.

Faire le choix de l’école buissonnière un dimanche, pour une bête à Bon Dieu c’est osé. Je l’ai donc invitée à se planquer dans ma chambre. Nous avons regardé des livres d’art ensemble et elle s’est envolée, à moins qu’elle ait été happée par la Beauté d’une œuvre d’art… Le mystère de la création…et de ses points !

Depuis, je dessine pour me retrouver en tête à tête avec mes pastels et mon imagination. Je remplis des points et à la fin ça fait de drôles de bêtes, et après plusieurs heures de retrouvaillle avec mon cœur d’enfant, c’est comme si je faisais l’école buissonnière, et que je disparaissais à mon tour de la réalité, les poings dans mes poches, la bouche en fleur !

De l’amour des intervalles

Au collège, pendant les cours de mathématiques, nous apprenons le principe calculatoire des intervalles. Ce matin, grâce à l’heureuse initiative de la RATP, je vais le mettre en pratique. Depuis qu’il neige, c’est encore plus compliqué de voyager sereinement sur la ligne 13 en direction de St Denis. Le nombre de conducteurs de train venus travailler est d’1 sur 4 et comme en tant normal il est prévu 1 train tous les 4 minutes, faites le calcul ! C’est bien les intervalles, ça permet de compter pour s’occuper l’esprit… 😉

Et puis, pour être encore plus drôle, les indications sur les quais concernant les 2 directions de la Fourche sont inversées. Les voyageurs croient aller à St Denis et le chauffeur annonce que non, nous allons à Asnières après quelques stations…

Ah ! vive la neige en Île de France, la bonne et jolie N118 et ses automobilistes abandonnés à leur triste sort (Charles Trenet aurait pu faire un remix de la Nationale 7) et le patinage artistique dans les rues de Paris car le sel et le sable préfèrent rester sur les plages bretonnes si tranquilles… Je les comprends, j’irai bien faire un tour, sur la côte, pour ressentir pleinement la beauté, me laisser envelopper par le manteau blanc de la neige et l’entendre crisser sous mes pas de passager terrestre !!!

Parce que les neurones s’arrosent, les jours de pluie, j’oublie mon parapluie ! 

Le monde sépare les espèces et la distance invite puis créé le mouvement. Naturellement, les arbres aiment à se perdre dans les forêts et les Hommes aussi. Parfois, ils jouent à cache cache les uns avec les autres, et comme par magie l’Homme finit par oublier qui il est et à monter dans un arbre jusqu’à se prendre pour le roi de la forêt, tandis que l’arbre ne se prend que pour un arbre. 

Dans sa vie citadine, le bipède, s’il vient à croiser un arbre accroché au bitume, sent la photosynthèse le pousser à se tenir droit, comme par mimétisme, et à s’ouvrir telle une feuille qui aurait été pliée par trop de CO2. Le crâne connecté à son environnement artificiel, il n’aspire qu’à se rapprocher de la nature. Quand il y pense, il est vert, vert de honte de ce qu’il fait contre ses ou ces arbres qu’il chérit tant. Lucide, il sait qu’il doit économiser son oxygène, et son inspiration le conduit régulièrement à écrire sur une feuille virtuelle qu’il rêve de s’incarner en arbre car bientôt, des vrais arbres il n’y en aura plus. Le poumon de la terre se resserre, et son cœur d’Homme peine à respirer. 

Pour aérer ses idées sombres, les soirs où ça tape fort au-dedans, il ouvre sa boîte crânienne, histoire de percevoir un bout du ciel, les astres clairs et les vagues étincelantes de l’océan toujours là, mais jusqu’à quand ?

Et, puis il s’étend sur son nid et se rapproche des oiseaux de nuit, attentif au silence impossible de la ville certie des vrombissements des moteurs. Toujours en mouvement, il bat des ailes pour ne pas oublier que l’enfant qu’il était est toujours là, prêt à grimper dans les arbres et à jouer à cache cache avec lui-même, au cœur d’une forêt urbaine euphorisante et électrisante.

En cheminant, je vis le mouvement, … pleinement et autrement (poil aux dents !)

Je marche, inlassablement, vers je ne sais où, j’allège mon sac à dos, avec le temps, bientôt je me promènerai nue ! Je choisis de préférence de ne pas mettre de gants, et de me laisser piquer par le côté pointu de la vie, tout en ayant un regard attendri pour sa tête arrondie. Je roule dans les bottes de foin, je me secoue les puces, j’éternue, le nez rempli d’air et de poussières de paille, parsemées de particules fines. Avec deux doigts, j’attrape un mouchoir tombé du ciel, je ramasse mes larmes nasales et la sueur de mon corps que je noue en boule pour asseoir le vide au fond de mes poches. Bien délestée, je vole, je plane, j’improvise un numéro de claquettes sur une plage de sable fin, les palmiers s’esclaffent, de me voir ainsi me prendre pour Fred Astaire chantant « the way you look tonight » et Frank Sinatra nous ramène « the voice », c’est la classe, Hollywood en a la chair de poule. La tempête Carmen adoucit son ire, et finit par utiliser son souffle pour siffler, intriguée par ce moment qui défie la pensée humaine. Les poissons, coquillages et crustacés sortent leurs plus beaux atouts, perles, et pinces fesses pour ajouter un peu de piment à la partie. Je chemine, sans tirage, la flamme éclaire le paysage et les visages, je vis le mouvement, pleinement et autrement, mes dents sentent pousser les bourgeons des fleurs derrière les poils du vent.

First train to Paris 

Condensé temporel, une semaine après mon cours de dessin pour lequel je me suis préparée en 7 minutes grâce à une panne de réveil, l’événement s’est reproduit ce matin. Heureusement, papa m’a réveillé à 6h25 et, dix minutes plus tard nous étions en voiture, direction la gare TGV puis Paris. Peut-être avais-je abusé de la bûche aux marrons… qu’une de mes belles sœurs avait concoctée. Un délice, comme les deux autres bûches (chocolat et praliné) et repas de ce we familial.

Dans le train j’écoute Electric Light Orchestra « last train to London », j’ai le cœur rempli du baume familial, je crois même que j’en ai dans les poches. J’ai la frite, mon steak tient sur ses pattes. Mon sac à dos est un peu lourd, mais il me tient droit et à la surface de mes yeux, de la buée me rappelle qu’il a fait froid sur le quai de la gare.

Maintenant place aux Carpenters « sing ». Je me dandine sur mon siège, pas coiffée mais avec deux doigts de crème sur le visage, et deux clémentines et un café dans l’estomac. Puis suit the avalanches « since I left you ». Et, je ne sais plus où je suis, dans la maison de mon enfance auprès de mes parents, aimants, attentionnés, jeunes comme s’ils avaient encore 20 ans, tout jeunes mariés, ou dans un monde contemporain où je m’invente une nouvelle famille, une trinité incarnée, qui me frictionne aussi de son huile essentielle. Je danse sur « Summer place » de Percy Faith. Je crois que le sommeil sonne, mon corps se raidit et se détend aussi, il est un peu perdu, le réveil fut de courte durée… pourtant l’idée c’est d’aller travailler !

Le bal s’invite le 31

Ce soir, je vais danser, et je m’y prépare depuis que j’ai répondu « oui » à l’invitation mystérieuse d’un(e) auteur inconnu(e), amateur de bal dans la capitale. Cette lettre me précisait que chacune, chacun, devait avoir l’amabilité de se mettre sur son 31, voilà qui tombe bien puisque le jour de la rencontre se tenait le 31 décembre. 

La question terriblement fondementale et terrestre est quelle robe choisir puis poser sur ma peau et ajuster à mes mensurations. Si ma taille est petite, et mes hanches étroites, un vrai mec pour d’aucuns, mes seins me rappellent que je suis une femme et leur forme en pomme, un duo de reines des reinettes forcément, ne me rapproche pas de la limande. Je me suis rendu place de la Madeleine chez ERES, plus connu pour ses maillots de bain que pour ses dessous, et j’ai flashé étonnamment pour un soutien gorge orange, un 95 A ou un 90 B je ne me rappelle plus bien, assorti d’une culotte shorty tout aussi lumineuse. Le coton de par sa texture se rapproche d’une peau de pêche des vignes, subtilement granuleuse et soyeusement douce au toucher et à porter.  Il faut que ça irradie au-dedans, me murmurai-je à moi-même. L’essentiel ne se voit pas au premier regard et pourtant un peu aussi, beaucoup même voire à la folie. 

J’ai ensuite pensé à ma robe bleue nuit, qui épouse les formes de mon corps. Je m’imaginais, telle Rita Hayworth dans « Gilda », semblable à un soleil nocturne se mouvant d’un déhanché à l’autre, portée  par une sensualité débordante, de toute sa hauteur, puis déshabillant mes longs gants sous le regard hagard de mon (ma)  partenaire sur l’air de « put the blame on me ».

Ensuite, je me suis vue dans ma longue jupe noire en laine anglaise plissée d’un côté et portefeuille de l’autre. Mon chemisier ajouré de couleur crème laissait deviner mes épaules osseuses. À cet instant, je me perds dans mes pensées et songe à la chanson de Véronique Sanson, « une nuit sur ton épaule », flottant dans l’air d’un temps étrangement proche et lointain.

Finalement, je choisis un tailleur pantalon  gris souris et un chemisier noir satiné sur le col. Je prends le métro et pour une fois une autre ligne que la 13, j’arrive en bas du perron, je prends le temps de respirer et je dépose mes idées fleurs bleues et mon manteau au vestiaire sans oublier mes gants en peau. J’avance dans la grande salle, timide, le cœur à l’arrêt car je crois deviner ma princesse charmante, celle de mes rêves inaccessibles, inavouables. Son carosse garé devant l’opéra Garnier aurait dû me mettre la puce à l’oreille sauf que je n’écoute pas les petites bêtes car depuis l’enfance elles habitent mes sommiers et souvent me réveillent dans la nuit… et alors je tombe du lit ! J’esquisse des pas mesurés, tout mon contraire, et je me rapproche de la belle inconnue que je reconnais. L’orchestre de ce bal du 31 entame un air mexicain « perfidia ». Je n’ose le croire, c’est Wong Kar Wai que j’associe à ce moment, celui de la première danse. Le metteur en scène chinois, né à Shanghai, aime cette musique d’un grand romantisme qui illustre parfaitement ses plans séquences de ralentis légendaires filmant des couples à l’amour impossible. Je me rapproche de celle que j’aime, en secret, mon astre noir, les sièges ont été enlevés, Chagall nous protège, et nous échangeons un premier baiser sur nos joues fraîches et maquillées. 

Posé sur le parquet en pointes de Hongrie, le vernis permet aux chaussures de glisser et aux cavaliers de se rapprocher sans crainte. Chacun écoute le rythme de l’orchestre et épouse le corps de son partenaire sans vraiment le coller ni le connaître. Je ne sais quelle est cette danse, elle s’inscrit sur six temps, elle est rythmée ni lente ni rapide, elle est enveloppante et sensuelle, les jambes tirent sur les muscles et les bassins des partenaires se racontent des histoires verticales avec une faible probabilité de futur horizontal. Le tourbillon se dessine, je sens l’ivresse gagner les pores de ma peau, mon sang se concentre dans mon tissu veineux et l’influx me pousse à être heureuse, un bonheur éphémère comme l’air, comme cet air mexicain en ce soir du 31.

La pyramide humide du Louvre

Pour les promeneurs au cerveau inversé, distraits en profondeur, la pyramide de Pei semble flotter, prête à larguer les amarres. Ce n’est pas en felouque que j’y accède mais avec mon petit moteur intérieur. Les jours de canicule, le bassin à débordement appelle, la passante que je suis, à venir tremper ses doigts de pied plats et agiles. Plaf, plouf et le tour est joué, je m’allonge telle une planche, recouverte de kilos de sel de Guérande. Je flotte, semblable à un bar de ligne en croûte de sel. Cette méthode permet de se prémunir contre les UV de mauvais augure pour mes grains de beauté. Parfois, des pêcheurs à la ligne s’imaginent ferrer un gros poisson, sauf que, d’un coup d’un seul, je me lève, et là, ils perdent leurs illusions, effrayés par le côté salé de l’affaire, ils remballent tout et se collent une mouche sur la joue.

Vue de mon balcon idéal

L’Everest à Paris, c’est « le » balcon, « la vue » avec « le » balcon, et si possible, une vue imprenable gorgée de beauté, un endroit qui ne peut être apprivoisé que de là. Mon balcon idéal, je l’ai saisi, ce matin, avec mon oeil, à peine défroissé de la nuit. En passant par hasard, dans cette rue, près de la place Vendôme, plutôt que de regarder les vitrines des joailliers, je me suis attardée sur cette contre-plongée, une renaissance de l’aube.

A hue et a dia, à dada sur mon âne, je pars de l’Olympe

Soleil et bleu du ciel, y a pas à tortiller, l’air de la rue m’appelle. Changement de temps, ou de paysage, en fonction de ce qui me passe par la tête, je ne tourne pas longtemps en rond. Tout de suite, maintenant, je commence par photographier la vue de mon nid, puis, j’ôte mes ailes, pour me poser sur terre. C’est étonnant le passage d’un monde à l’autre, tout est dans la transition. Parfois, j’y pense comme si je voyais l’arrivée d’une lame d’écume, qui annonce une plus grande vague voire la grande marée, et d’autres fois, c’est l’inverse, je ne pense pas, je suis dans l’oubli de presque tout, absorbée par l’abstraction du vide, ce préalable composé de plusieurs inspirations et expirations sans but intrinsèque, un réflexe qui fait le lien avant de se remplir des rencontres à venir. Mon animal hennit, il s’impatiente. Je tiens les rennes, son museau hume l’air, je mets mes jambes à son cou. Il hésite, mais il sait que c’est son jour. Il regarde, il ouvre son oeil, le pare-soleil ne devrait pas gâcher la pellicule absente. Mon animal c’est un appareil photographique, un Olympus Pen, un hybride qui m’accompagne à chaque sortie, il est mon fidèle ami, toujours là, pas bien bavard, un peu bêta, surtout quand Antigonegone fait n’importe quoi avec la technique et se perd entre la priorité vitesse et l’ouverture. Captations du réel à venir…

Je suis devenue fleur à Giverny

ça s’est passé, aujourd’hui, samedi 27 mai 2017, nous nous étions donné rendez-vous avec Anne, en ce joli mois de mai, mues par l’envie de pousser la porte du paradis fleuri de Giverny. Je l’ai donc retrouvée, tout près de la gare d’Enghien-les-Bains, il faisait déjà très chaud à près de 11h du matin. Et hop, en route, Anne lance le pilotage automatique de sa Toyota hybride, et nous décollons à bord de son véhicule au doux ronronnement japonais. Arrivée sur le territoire indiqué par le GPS, vers midi, les parkings de 500 places débordaient de voitures et de cars, nous n’étions pas les seules à avoir eu l’idée…Après s’être garée avec difficultés, nous avons patienté un bon quart d’heure à l’extérieur du domaine, car nous avions omis d’acheter un billet coupe file mais grâce à la sollicitude d’une femme, gardienne de musée, nous avons pu contourner la foule, en ayant recours à un autre accès, qui se dérobait à la vue du touriste moutonnier. Nous crevions de chaud et nous voilà comme par magie, barbatruc barbapapa, dans le jardin, en position de touche touche avec nos voisins bipèdes. Certains avançaient avec un déambulateur, d’autres avec un berceau, c’était comme si le monde s’était dit « allons emmerder les 2 Anne dans leurs pérégrinations naturistes  » ! C’était réussi ! Nous étions au royaume du ciel et la grâce nous avait donné des ailes, la légèreté nous soulevait les oreilles, nous nous moquions des réflexions à la noix et du resserrement des rangs confinant à une promiscuité des plus chaleureuses… Nous ressemblions à deux hobbits, la tête enfarinée, heureuses comme des jardiniers incapables de travailler la terre et de donner les noms des plantes ou des fleurs. Ah si Cécile avait été là ! Avec mon Captain, nous aurions parlé aux plantes sans connaître leur patronyme ! Autrement dit, nous arpentions, Anne et moi, le terrain, le jardin, telles des urbaines avec un appétit d’ogresse gourmet, amoureuses de la beauté, de la nature et de la vie.

Pour visiter l’intérieur de la maison de Monet, son atelier salon, couvert de tableaux, des reproductions de ses oeuvres ou de ses contemporains, les deux chambres, la salle de bain et la cuisine, nous avons patienté plus de 3/4 heures au milieu des fleurs, circulant à hue et à dia dans les allées ouvertes à nos pas et à nos regards émerveillés. D’autres chemins fleuris n’étaient pas à notre portée, car en phase de repousse, nous ne pouvions que les apercevoir. L’herbe, les plantes, les fleurs semblaient plantées au hasard du vent ou de la brise. C’est un jardin à l’Anglaise, faussement désordonné, comme nous ! Quant à sa demeure, je n’avais pas un souvenir aussi net de son goût pour les auteurs d’estampes japonais, Hiroshige, principalement, Utamaro aussi et quelques Hokusai. Une merveille que sa maison, son jardin, la bambouseraie jouxtant le plan d’eau, les nénuphars et ses petits ponts.

Ici à Giverny, les nénuphars semblent sortis d’une pluie d’encre, les pivoines de la tête d’un poète fou, et les coquelicots aux alentours du musée des impressionnistes, au coeur du village, sont cultivés dans un magasin à ciel ouvert, et s’offrent aux passants, telle une provision printanière. Mes 5 sens étaient aux aguets, ils flirtaient avec la liberté, celle qui ne s’est jamais tarie, celle de l’enfance pas si enfouie que cela. J’avais envie de me rouler dans ce champ protégé, tout était là. Je n’ai pas su contenir mon oeil, mon appareil photo s’est faufilé entre les tiges, les corolles, les pistils, les pétales, et je suis devenue fleur à mon tour.

De l’abstraction à la figuration, la palette de la nature a sorti ses plus belles cartes. Nous avons assisté à une forme de tintamarre sans bruit, et ressenti un temps, la trêve des illusions, car Monet était là, vivant, et son jardin prolongeait son Art.

 

 

 

De la nostalgie du gris

Assez de l’être vertical ou de la marche, je m’assois dans le présent, totalement là, dans l’instant, et me raccorde à mon noyau décentré, cet électron libre et par trop agité. Que la météo soit apaisée ou en état de tempête, je diverge naturellement du sol et gamberge en direction du ciel. Ainsi va Antigonegone.

Retour sur mon siège, des veloutes de nostalgie me dévoilent à moi-même et m’ennuagent. Le gris va chercher ses racines dans le fond du fond de mon plafond, à l’épicentre où se collent les papillons noirs, les jours où il fait nuit et les nuits où le jour ne veut pas fuir. Je ne sais ce qui m’anime, je bouge au-dedans. Je ne me la raconte pas, des histoires bousculent mes parois de protection. L’air que je respire est vrai, tellement concentré en vérité que je ne peux pas dire si je saurai en sortir vivante. C’est une épreuve, que cette spirale, la vague me rapproche des rares vivants qui me semblent l’être à part entière. On se tient étales, allongés comme un trait d’union, près des uns des autres, aimantés, aimants, amoureux de la vie, prêts à se remettre en situation verticale et, à devenir ce que nous sommes et serons toujours.

Un rayon de soleil me sort de mon papillonnage, à quoi bon être ou faire semblant, autant faire des vraies choses ! Tiens, j’irais bien construire des châteaux de Sablé en Sarthe, juste comme ça, pour changer de costume, un petit tour et hop, le temps d’oublier mes affaires, des fariboles métaphysiques qui n’en sont pas !

Mais, l’essentiel n’est pas forcément sis, ailleurs, il peut aussi s’éveiller, ici et maintenant. C’est ainsi que le voit Antigonegone, définitivement gone et on ! Rideau sur l’ombre grise  de la nostalgie et place à la lumière jusqu’à la prochaine visite des papillons !

À la recherche d’un brin d’oxygène, d’un plus grand souffle

Dans le métro, ce matin, la chaleur suffocante fait ressortir un brin d’humanité à ses passagers. Certains parlent tous seuls sans qu’aucun son ne sorte de leur bouche. Une autre se coiffe les cheveux. Et puis il y a ceux qui pianotent sur leur smartphone ou qui écoutent de la musique avec un casque. La solitude est évidente. De manière inhabituelle les wagons ralentissent entre les stations du fait de travaux et de la régulation associée. Il fait lourd, très lourd.  Une femme se met à crier « putain », retard probable à un rdv professionnel ou personnel. D’autres encore sont au bord de l’évanouissement et réclament qu’on aère, sauf que, les ouvertures baillent déjà à leur optimum. J’ouvre la bouche et le son de ma voix, et suggère, haut et fort, « enlevez votre manteau et votre écharpe, vous verrez, ça ira mieux. D’ailleurs, je l’ai fait ! » Quelques minutes plus tard, des voyageurs à proximité d’une jeune femme, qui ne se sentait pas bien, l’extraient du wagon, plus tôt qu’elle ne l’aurait voulu, car elle était grise comme une madone en marbre nervuré du Bernin.

Au moment où j’écris ce que je vois et ressens, je suis en route vers St Malo, son accès privilégié à la mer horizontale et son attrait pour les trombes d’eau verticales. Serrée comme une sardine, j’imagine déjà le « Grand » air, l’air breton, le vent du large et la fraîcheur marine. Aux côtés de mes congénères du métro parisien, je recherche un nouveau souffle, un brin de cet oxygène qui nous aide à respirer et à rêver, tels des voyageurs immobiles en apparence mais en mouvement au plus profond d’eux-mêmes. C’est comme si le métro n’était pas un voyage mais un mode de transfert, un moyen de se régénérer entre deux lieux ou deux rencontres.

Dans un cimetière dormant (le club des 11)

Dans un cimetière dormant, je cherche le bois qui me rend belle, à moins que ce ne soit la belle, qui fait feu de tout bois, qui me rendra de marbre ! Tiens, elle a tiré sur ma barbe et je ne me suis pas transformée en baobab. 

Barbatruc, ma belle au bois dormant a lu puis bu mes rêves, je me retrouve sur le bitume à moins que ce ne soit sur le lino d’Asselineau qui jure que la vie politique est ailleurs, loin des lois et des décrets et de la jurisprudence. « Oh dear prudence », je n’ai pas de fée à mes côtés, abracada sans bras ni pirouette, j’ouvre les yeux puis les referme aussitôt.

J’avance entre les concessions du cimetière dormant laissées à l’abandon et je m’adonne à rêver, à Macroniser, tout en marchant, telle Macbeth, jusqu’à envisager le régicide du père Mimolette. Je ne sais si je vis un cauchemar ou une hallucination. Le temps d’une étincelle, un songe me plonge dans un autre monde où tous les tours sont permis.

Je me détends, je m’étends, je deviens étale, semblable à une feuille marmoréenne, une aile, en apesanteur, alignée sur un flot immense de souvenirs composés de vent et de vivants.

J’avance sans être totalement en marche et en même temps je ne vois pas quelle autre cheminade emprunter. Je benoitise, je quitte la salle vide du passé, le point saignant, le pen sans encre, le fiel grognon du melenchon. Je navigue comme Arthaud, pas avec celle aux cheveux courts et aux idées qui ne le sont pas moins, non je navigue avec Florence, au long cours de l’éternité quand d’un coup je prends un coup dans le fion ! Bâbord tribord je peux presque tout mais pas poutou qui incarne l’enfer sans humour ni second degré. Le théâtre est grotesque. Cher Guignol, reviens, fais-moi rire ou a minima sourire ! La place est déserte, vide, Guignol s’est évaporé …

Errante, je suis hantée par la renaissance de la République, une agora, un lieu d’apprentissage de la liberté, sans frontières, le seul endroit vital qui fait oublier l’inconsistance de fausses promesses et de médiocres acteurs. Et pendant que l’école de la démocratie agonise, Antigone ironise, mais elle veille aussi sur le cimetière dormant, et ses ruines gréco-romaines desquelles le Phœnix peut encore renaître de ses cendres !

Villetrun un jardin gallo-romain

Jadis, presque deux millénaires en arrière, Villetrun était une ville gallo-romaine. Il y a une quarantaine d’années, des archéologues y ont retrouvé les fondations de villas. Un amateur (au sens d' »amare », aimer en latin), papa pour ne pas le nommer, en ouvrant les yeux, par hasard et sans chercher, s’est baissé et a ramassé, sur ses terres, des objets en bronze (une clé de villa, des pièces de monnaie, une cuillère à parfum), des anneaux en verre opaque, des pierres polies « des bi-faces » et des pierres taillées, des poids et d’autres trésors de son passé. Il a d’ailleurs collecté toutes ces pièces pour reconstituer un puzzle enfoui jusqu’à les exposer, à l’abri du regard, dans un appentis du corps de notre ferme. Toutefois, de temps à temps, il ne résiste pas à l’envie de les présenter et de les commenter à ses amis ou à des spécialistes.

Aujourd’hui, Villetrun est un immense jardin de terres cultivées, un grenier à ciel ouvert à céréales, mais aussi une pépite du jardinier qu’est papa, comme le montrent mes photos.

A Villetrun, j’y viens par le train, depuis la grande ville, pour retrouver des parfums, des arbres fruitiers (pommiers, cerisiers, pruniers, pêchers, poiriers, sureau), d’autres arbres (noyers, boulots), des arbustes (thuyas, framboisiers, groseilliers, noisetiers), des fleurs (pivoines mes préférées, roses, primevères, tulipes, hortensias), de l’herbe sur un hectare, et un autre bout de moi, mes origines gallo-romaines, même si elles ne se voient pas ou plus, sans oublier, le jardinier archéologue, papa et la femme du jardinier, maman.

Retour en TGV en sens inverse de la marche

Les paysages défilent au galop et je ne sais pas trop où je vais car, dans le TGV de retour, j’ai la tête aspirée par ma terre d’arrimage, tout près et déjà si loin du sol Vendômois, et je sens aussi mes fesses qui sévissent avant de dévisser du côté de la Seine et de ses courants jamais les mêmes.

Le petit saumon anethé est tranquillement assis sur son siège,  à l’écoute de ses cases intérieures, remplies de douceurs villetrunoises et de lumineuses présences.

Je ferme mes ouïes et mes orbites, je respire par tous les pores et j’entends siffler le train, celui de la vie, de l’envie, du bel aujourd’hui.

Blues du Vendômois 

Aujourd’hui vendredi 31 mars 2017, le bleu du ciel a laissé sa place au gris souris. Mes yeux font une pirouette puis une roulade et passent du vertical à l’horizontal. 

Sur un mur du parking de l’ancienne gendarmerie, j’aperçois un tag (La signature de l’artiste ?) et le visage peint d’un adolescent. L’artiste a su mettre du bleu et de son âme sur ce mur gris. 

Me voilà, heureuse, heureuse de cette permutation des supports et des couleurs. Dans mon corps, je chante le blues du Vendômois celui qui parle du bleu du ciel qui a disparu pour mieux faire rayonner et mettre en lumière ce visage d’adolescent. L’Art, grâce à un artiste visionnaire, celui qui voit et qui en laisse une trace, ouvre d’autres perspectives, il prolonge la nature, il est fragile aussi, mais il fait rêver penser imaginer ! 

Quel bien fou que de pouvoir voir l’Art dans la rue, à portée d’œil ! Merci l’artiste !

Et si on faisait un tour à Tours ?

Parfois, on se joue des tours, et une ville symbolise cette figure de style, elle porte le doux nom de « Joué-les-Tours ».

À d’autres moments, on fait fi du figuré, mû par une soif de géographie et de rapport direct aux lieux. L’idée est simple, se laisser porter, suivre les rues en faisant  des tours et des détours, des demi-tours, se perdre, oser les contours et les retours, et l’un des meilleurs endroits avec plus d’un tour dans sa poche s’impose, avec évidence, c’est Tours, qui délivre ses atours multiples, à la fois terrestre et fluviale, trait d’union entre l’Indre et la Loire.

Jean Nouvel y a montré le bout de son museau, en architecte remarqué du « Vinci », Palais des Congrès qui regarde la gare, et qui avait, à l’époque de sa construction, piqué du nez, assurement un problème de maîtrise d’œuvre….

Tours et son opéra, rue de la Scellerie, qui a remplacé un couvent détruit peu après la Révolution, opéra qui a ensuite brûlé au 19eme s. Tours et son musée des Beaux-Arts sis dans le même quartier, tout près de la Cathédrale, à droite de la rue nationale, cette rue rectiligne qui relie la place Jean Jaurès de l’Hôtel de Ville à la Loire. 

Mais n’oublions pas de détourer l’autre côté de la rue nationale, où Balzac a vécu les 7 premières années de sa vie avant de connaître le pensionnat des Oratoriens de Vendôme. Rendez vous sur la place Plumereau, de forme carrée, entourée de maisons à colombage, des cafés nous invitent à nous y déposer. Dans ma mémoire, je retiens « le Vieux Mûrier ». Sa décoration intérieure, du genre foutraque étudié, se compose de fils suspendus habillés de vieilles affichettes tenues par une pince à linge et de tables « Singer » pour ajouter à son caractère suranné. L’expresso est servi dans des verres en pyrex. Je me souviens d’un fond sonore, l’adagio du concerto pour piano qu’ils passaient et repassaient, il y a 26 ans, c’était le 21eme de Mozart, interprété par Geza Anda, un pianiste hongrois, célèbre dans Bartok. 

Et puis je garderai le meilleur pour la fin, les Studios, un cinéma Art et Essai, situé à l’entrée de Tours, quand on arrive de Paris par le boulevard Heurteloup, et qui publiait un petit journal mensuel dont la force d’attraction lui permettait de réunir la fine fleur des tourangelles et tourangeaux. Je n’oublierai pas non plus la rue de Bordeaux, qui part de la gare et qui nous emmène jusqu’à l’avenue de Grammont, elle recèle un trésor, une échoppe où l’on fabrique des brioches fraîches. Aussitôt sorties du fourneau, elles sont vendues aux plus goutmets, puis ils ferment boutique jusqu’à la prochaine fournée. 

Et puis, difficile de ne pas détourer sur la photo souvenir, la fac, boulevard Béranger et ses rues parallèles, rue d’Entraigues et Victor Hugo.

Retour printanier en Loir

À chaque changement de saison, j’aime nager à contre-courant, en Aneth saumonée, et naviguer les pieds nus, sur le chemin clair et obscur de la Guimanderie, au plus près des terres plates et arables de mes ancêtres, un retour aux sources à quelques centaines de kilomètres du Mont Gerbier des Joncs.

Le matin, je saute du lit, sans chaussettes, la voûte à plat, l’œil qui frise, et avance, comme un petit animal, dans le jardin printanier de la maison familiale. Un hectare d’herbes, de pelouse, de potager et de verger régénère mes orteils jusqu’à mes oreilles. L’ivresse s’empare alors de mes poils et de ma peau, je frissonne, je ne sais si c’est l’instant qui me remue, ou si je remue tout court et que l’instant s’est figé.

Étrangement, me retrouver immergée dans ce lieu très personnel, me rapproche de la globalité du monde. C’est à Villetrun que l’infiniment petit et l’infiniment grand se rencontrent. Je crois que c’est l’âme du lieu qui emballe tous mes souvenirs et me libère de mes histoires à venir. Ici, c’est un peu mon île, « mon Ithaque » et ceux qui l’habitent, mes parents, arrivent à me mettre à l’endroit, ce qui est un exploit !

Tout à coup, je sors de mes pensées, éveillée par le tic tac d’un petit bec, sec, qui pique dans une écorce de boulot. Et tout en marchant, je me sens happée, par le noyer immense qui trône et qui me rappelle que mon retour est généalogique et logique. Telle une toupie ou un derviche tourneur je me recentre régulièrement sur mon noyau pour mieux agrandir le cercle de la vie. Je me souviens de nombreuses scènes qui se sont produites sous cet arbre, le lendemain du mariage de mon frère aîné, un pique-nique en compagnie de copains de mon frère cadet, des jeux avec Bob le chien et des amis. Puis, de manière plus prosaïque, je regarde le noyer, qui, les jours de grand vent, fait trembler de peur mes parents, car son tronc pourrait venir fendre le toit et plus que mon imagination.

La Guimanderie est ma Maison Blanche, sans bureau ovale, adossée à la colline de Villetrun, personne n’en a jeté la clé. Elle est la clé de mes songes. De côté, elle prête son flan à un virage en épingle à cheveu, une géographie qui rompt avec les lignes trop droites de la région.

Au-dedans, la nuit, le bois craque, les souris grattent les cloisons et le chauffage central glougloute. Je rêve souvent les yeux ouverts, j’entends au loin les voitures qui profitent du printemps pour se faire la belle et tailler la route, et plus près, dans une sous-pente d’une grange, j’écoute une chouette qui hulule. Il paraît qu’elle parle à Antigonegone l’uluberlu qui a lu, bu et vu. Avec son chapeau pointu, le volatile invite au voyage.

Bon, je m’en vais dormir comme un loir, la tête en sourdine, en pensant ô combien sont heureux ceux qui partent avec un ancrage intérieur. Ainsi, l’horizon pour eux n’a pas de limites. Il se déplace, et se redessine, un trait jamais le même, telle la marée…

En ville, les arbres taillent la route

L’heure du printemps éclaire le ciel et l’horizon. Le bleu perce nos yeux et les arbres s’allègent de leur duvet hivernal. Exhibant leurs protubérances, les troncs semblent agiter leurs bras nus et leurs articulations en titane.

Je me réchauffe les mains rien qu’en regardant ce bois vivant qui  résiste au temps et qui illumine la rue et la vue. Les champs de béton en ont des frissons. Moi aussi.

Dans quelques mois, les arbres me montreront leur barbe feuillue et je leur laisserai entrevoir le duvet poilu d’Antigone en hibernation, pas décidée à cisailler avant l’été !

À Paris : pluie aujourd’hui (avec un choix citoyen plus que cornélien para ou pari pluie)

15h, rassemblement cet après-midi au Trocadéro, des pro-fillonistes vont venir se mouiller pour leur candidat noyé par ses mensonges et son inconstance, et pendant ce temps d’autres militants se retrouveront à la Place de la République pour réunir leur soif en la construction d’un monde meilleur, une terre sans frontière, ouverte aux citoyens du monde.

Faut-il se battre pour un homme médiocre ou des idées nobles ? Dans tous les cas, il convient d’assécher certaines idées avant qu’elles ne moisissent et ne dégagent des gaz nauséabonds.

Voilà le pari, le pari pluie d’aujourd’hui et la pluie à Paris, ça vaut le détour. Imaginez un petit coup de parapluie dans les fesses, pour se remuer, sans poison à la Bulgare, juste une pic et poc et ratatam, qui stimule pour voir et croire en nous, c’est énorme …

 Allez libérez vos baleines de parapluie ! Et venez à Paris Plage !

Miroitement sous la pluie

Sortir sans son parapluie aujourd’hui, à Paris, c’est un peu osé, moins toutefois que de sortir avec son tartan ou son longi sans culotte. Donc, je prends la pluie, de pied en cap, goûtant ses perles et son jus rafraîchissant et puis, je me dis, c’est amusant d’être mouillé.

L’onde de l’Inde bouge ma colonne vertébrale, je le sens, l’onde me plonge loin dans d’autres contrées inconnues de l’humain. 

Je ne suis pas en marche comme Macron, je suis plutôt en route à la mode des micro êtres vivants. J’avance avec les puces, les fourmis et les araignées ou les cafards. Je vais à une autre vitesse, le matin, j’émerge lentement. Je ne sais pas si les petits pas me rapprochent des petites choses et du vivant végétal et animal, ce qui est sûr c’est que je ne vois plus pareil, de l’infiniment petit à l’infiniment grand.

Le flux l’influx du sang, le rythme de ma respiration, de mes battements de cœur, et de ma pensée, tout diffère. J’observe cela depuis aujourd’hui comme une béance nouvelle, une curiosité à investiguer, un monde nouveau qui s’ouvre et me tend les bras.

Je goûte la vie, le cul déposé plus que posé, la tête ancrée plus qu’agitée et le corps léger aérien plus que lourd et terrestre.

Je ne sais pas si c’est normal ou pas, je le reçois ainsi, je ne le prends pas ce changement, il me saisit.

Je crois que je vis une nouvelle vie, les reflets du miroir sont multiples et infinis, j’entends que tout est possible, les chemins appellent des rencontres, le ressac est venu dans mon sac, et l’horizon n’est jamais le même. N’est-ce pas Mon Captain ?

Pirouette sans cacahuète

Je devrais déjà dormir, peut-être que je dors déjà et que c’est un fantôme qui écrit avec mes doigts, digérant des bouts d’existence qu’il aurait avalés, après avoir enlevé des vies. Je voulais écrire un papier gai, après avoir parlé d’un sujet qui ne l’est pas moins (gay :-), c’est raté.

Bon, ce week-end, j’étais à Vendôme, et dans notre village de la Beauce Pouilleuse, ce fut la fête, crème caramel, crêpes, et blanquette de veau, chapeau Suzon ! Et la salade que pourraient s’arracher les étoilés du Michelin c’est entre nos quenottes qu’elle a fini par se faire croquer, merci à Gérard le jardinier du 41.

Pour faire sourire mes parents, je vais écrire, bon, promis, « j’arrête pour ce soir, car sinon je vais me faire péter le caisson. »

Une dernière pirouette et pas de cahouettes « Christine »*, because it is time to go to bed.

(*) : des cahouettes « Christine » c’est extrait d’un sketch des Guignols entre Christine Ockrent, Serge July et Philippe Alexandre. Ces 3 journalistes débriefaient l’actualité tard dans la nuit, le dimanche soir, de mémoire.

Ma gare de prédilection : gare à tes fesses !

Pendant que la SNCF démantèle ses gares ou les cède à des particuliers pour qu’ils les transforment en villégiatures, je retrouve la gare TGV de Villiers en forêt de Vendôme totalement modulaire, lunaire, sans véritable intérêt architectural. Elle a le mérite de me rapprocher de mes parents et de me permettre de les voir plus souvent et ça, c’est énorme.

Aussi, dans le tunnel qui me conduit au quai numéro 4, sont exposées des reproductions plus ou moins fameuses. Ce soir, j’ai capté la célèbre photo du baiser, pas un baiser profond, certes, mais un baiser quand même, aux allures politiques, saisi en 1979 entre Brejnev et Honecker. À l’heure de la guerre froide, on savait se rapprocher…

En appelant Tristannette, le serpent à sonnette de ma folie douce a répondu à sa question :  » à quelle gare es-tu ? par  » je suis à gare à tes fesses ». Poilade.

Et puis, en termes de perspectives, regarder un baiser (hormis celui de Judas et d’autres qu’il est préférable d’oublier) ne fait jamais de mal. Tiens, le train entre en gare, j’envoie des baisers par le regard. Je vous embrasse papa, maman, amis, copains, et inconnu(e)s, sur la joue, sur le nez ou sur la bouche, ça dépend et ça ne mange pas de pain. Antigone n’embrassait pas n’importe qui, moi non plus :)))

Déhanché entre Vendomois et Bretagne

Je sors de sa pochette un vinyl en acétate 180g et je pose le diamant de l’aiguille de ma platine sur « Perfidia » de Xavier Cugat, musique mexicaine des années 40-50, présente dans les films noirs avec Bogart et The Look (Bacall) mais aussi dans ceux de Wong Kar Wai, une manière de déhancher le réel de sa vision de la vie, de sortir du micro-sillon.

Avec Alice je glisse de l’autre côté du miroir et je rejoins Marion du Faouët, cheftaine d’une troupe de brigands des grands chemins du côté de Quimper. Comment contenir sa rébellion ? Comment vivre sans union ? Comment être sans chanter sous la pluie et sans avoir l’âme en crue ? Comment vivre sans idéal ?

J’ai lu « Chère brigande » de Michèle Lesbre, lettre à Marion du Faouët, grâce à Marie-Claire, libraire résistante de Vendôme et j’ai eu la chance de rencontrer deux êtres exceptionnels par le truchement d’une troisième. Ma libraire l’auteur et le sujet. Ma trinité est celle-ci, je vous embrasse toutes les trois sans vous connaître tout en sachant que nous sommes sœurs, révoltées silencieuses.

« Je me souviens d’avoir eu envie de repartir sur le champ, d’aller vers l’océan, mon éternel refuge. C’était la saison des grandes vagues d’hiver, des plages désertes balayées par les vents froids, humides et poisseux qui prennent le corps. Il m’avait semblé lire sur le visage de cette femme que nous étions dans la même sidération, le même désir d’être ailleurs. Son retrait me la rendait proche, presque intime… »

En Touraine, j’ai pas la migraine, mieux vaut pas y penser…

Dans le TGV, les graines de pluie essuient les carreaux crasseux. La nuit ne s’est pas dissipée, elle a accueilli l’humidité en son sein (le gauche ou le droit peu importe). Entre les tunnels, les rails et ses chemins rectilignes me bercent droit car le trajet beauceron résonne, avec raison, en moi.

Je repense à hier soir, à ce moment rare, vécu avec ma fée, celui d’avoir pu se retrouver et vivre, ensemble, la plus belle Flûte Enchantée qu’il m’ait été donné de voir, écouter, ressentir. Tout était là, nous avons reçu en pleine tête et en plein cœur une forme aboutie de l’existence. Une réunion de la beauté en 5 dimensions, une sensation d’élévation. Les décors conjuguaient le vivant (herbe, photos animées d’une forêt de bouleaux aux différentes saisons), et la présence de la mort (en sous-sol, jonchaient des cercueils et des squelettes sur la terre battue, nue). Entre les deux, des trous et des tas de terre, desquels émergeaient des échelles très longues, permettant l’accès d’un monde à l’autre, de descendre vers l’obscur pour mieux retrouver l’essence de la lumière. La mise en scène de Robert Carsen était simple et remarquable au service du récit et des spectateurs. Les chanteurs circulaient sur une bande de gazon qui entourait la fosse de l’orchestre. Ils se tenaient tout près de nous et de l’ensemble de musiciens. Les élus de l’histoire, Tamino et Pamina, étaient vêtus de blanc. Mais en sous-sol, chez Sarastro, le « monstre » qui tient en otage Pamina, les membres de sa société secrète portaient le noir et un voile tel un mouchoir posé délicatement sur la tête. Et les voix s’accordaient divinement bien, en hommage à Isis et Osiris, toutes humaines et en délicatesse, jusqu’à celles des enfants et du chœur de l’Opera de Paris. La Reine de la Nuit était incarnée par Sabine Devielhe, immense et royale, aérienne et sûre. Les voix chez Mozart, en duo, en trio, en solo ou en chœur, c’est un miracle dont on se glorifie d’en avoir été le témoin.

Ce récit initiatique est un enchantement, un symbole de la possible victoire de l’Amour, de la force et de la sagesse sur la bassesse, la veulerie et le mensonge. Et si la grandeur était possible …

En Touraine, j’égraine ma joie et j’enfouis ma peine dans le parterre des rosiers. Je sors ma flûte et mes clochettes. J’imagine que, tôt ou tard, je rencontrerai Papagena ou Pamina, tout en étant consciente que l’Amour ne naît pas d’un coup de trompette, et que j’ai déjà eu et pour toujours, ma part de galipettes de l’âme et du reste…. Et de deux parts, parce qu’il est omniprésent en moi, l’Amour, il est octopus, semblable à une grosse bête tentaculaire qui vient de l’intérieur, et se diffuse avec l’âge, nourri de la chaleur de mes très proches frères et sœurs bipèdes. Ces derniers m’accompagnent, tels des compagnons de route et du doute, présents ici et partout ailleurs, dans la mer, sur terre, sous le vent, près du ciel et de ses nuages, et ensemble nous nous rapprochons, jamais trop peu.

Ainsi, dans le monde orange et étrange d’Antigonegone, les histoires sèment et poussent avant de repartir en graine dans la terre de Touraine.

Cabinet de curiosités

« Au Cyrano », fameux café classé de la rue Biot, tout à côté de la Place de Clichy, le graffiti a droit de cité. La salle « art déco » mérite le détour mais ses toilettes aussi, car son cabinet de curiosités a su redonner ses lettres de noblesse à notre alphabet et au sens des mots. A méditer ce soir : « Tirer doucement la chasse d’eau ».

Mais Cyrano c’est aussi la scène du balcon :

« c’est vous ?

Nous parlons de de d’un baiser

Baiser. Le mot est doux !

Je ne vois pas pourquoi votre lèvre ne l’ose… »

La banane et le pied en avant 

Paris se met à nu, tout en m’invitant à garder secrets, ses plus beaux passages et jardins, quand j’adopte un regard « piéton ». Avec le pied dans l’œil et la banane dans ma poche, j’avance aux aguets, consciente de pouvoir accéder à l’indicible, l’intériorité d’une Ville et quelle Ville ! Depuis trente ans, elle m’accueille et me travaille au corps. Tantôt fascinante, tantôt exaspérante. Ses réseaux qui m’irriguent me bercent et me tranquillisent. Hier, en longeant la Seine, traversant le Pont Neuf, je ressentais ses mouvements me faire du bien, me caresser dans le sens du poil. Je ronronnais comme Medor Pas et j’avais la banane pas que dans la poche. Et puis, je suis passée devant une Porte impressionnante, en bois de chêne brut, percée par des structures en fer forgé. Elle ne s’ouvrait pas, je l’ai contournée, et derrière ce sésame, immuable, s’offrait à mon regard, la cour carrée du Louvre. La nuit frisait, encrée par des nuances de bleu et exerçait une attraction des astres sur mes pupilles. J’irradiais au-dedans. J’avais passé mon après-midi à rêver à des lectures prochaines en compulsant des livres d’art chez Joseph Gibert avec mon ami Bruno. Nous étions comme des gamins au cirque. On se disait « eh regarde ce Citadelle Mazenod « écrire la Mythologie » ou celui-là « écrire le Voyage ». Et je ne vous dis que ça … Et plus tôt en avant mon dejeuner avec les Sophies m’avait donné une énergie verte et positive, celle des retrouvailles, qui dépasse cette ironie du temps qui passe.

La cour carrée bleutée m’entortillait les neurones et les synapses et ouvrait les valves de mon cœur. Je voyais des étoiles scintiller sur la pyramide de Pei et je ne savais plus si j’étais d’ici ou chinoise, retournée à l’époque de Philippe Auguste ou bien ancrée en 2017. Et ensuite, je me suis retrouvée place du Palais Royal et j’ai avalé les perles de Scheherazade. La coiffe de la bouche de métro, à cet endroit, semblait constellée de couleurs pourpres jaunes orangées et bleutées et les formes arabes et galbées de ses ornements me transportaient, ailleurs, au pays du conte des 1001 nuits, d’une vie sans cesse renouvelée. L’éternel m’accaparait. De ci de là, tel un crabe bipède, je suis entrée dans la librairie d’Ali Baba « Stock Delamain » qui appartient à Gallimard. Les boiseries et l’odeur du papier m’ont propulsée dans d’autres univers, et je n’ai pu résister à la lecture à venir de livres illustrés, des promesses d’aventures qui me font frissonner rien que de vous l’évoquer.

Peut-être, parce que j’avais perdu pied, j’ai mis ma banane dans l’œil et j’ai opté pour l’effet longue vue sauf que je ne voyais que des moments de joie à venir. Malgré mon aveuglement, l’opéra Garnier a bien voulu m’accueillir pour couronner la journée. J’étais chargée comme un baudet loin de l’allure élégante de l’amateur d’opéra parisien. Cela ne me semblait pas gênant car j’étais venue écouter voir Cosi Fan Tutte consciente que Mozart se moquait des apparences. Voix sublimes doublées de pas aériens, j’étais aux anges, muette et sans tutu. Avec Anne, nous avons remué nos oreilles de contentement. Philippe Jordan était fringuant et l’élan d’Amour véhiculé par la musique nous a tiré la tête vers la coupole, émerveillées par Chagall et ses couleurs, féeriques et graves à la fois.

Me réincarner en singe sur ton épaule

Quand une herbe folle rencontre une brindille, forcément ça photosynthèse. Depuis le printemps dernier, soudain seule et agile comme les blés qui épousent le vent, et dodelinent de leurs têtes ébouriffées, je rêve éveillée dans un bus qui carbure au diesel pas tout à fait vert. Je me sens verte pourtant et printanière malgré mes 48 étés. Je m’émerveille de la beauté de la Nature et de certaines rencontres humaines quelles que soient les saisons et les raisons.

L’heure éternelle et sans retour me perfore les doigts de pied et soulève ma cap. Le simple fait d’être là, vivante me de-scelle le cerveau. Je sens en permanence mes « fêlures laisser passer la lumière », attentive aux courants d’air de mon âme et perméable aux flots de la folie terrestre. J’habite au milieu de nuages flottants, mon univers n’a pas de frontières ni de limites en dehors du respect, ma seule croyance est celle du doute. Mais ces éléments intérieurs ne sont visibles que par mes amis de la mer et des sphères extra-terrestres. Mon credo, le vie est une fête, comme Picasso l’a si bien dessiné dans cette danse des faunes (dans la photo en tête d’article). Une façon de dire rien de tout cela n’est sérieux.

Pour mieux ressentir la présence du sol et du ciel, rien de tel que de pratiquer l’entre-chats et les pointes, ce ne sont pas des pas de marcheurs mais l’occasion d’avancer en dansant pour changer de rythme et prendre de l’élan !

Un jour bientôt, Chère brindille, je me réincarnerai en singe sur ton épaule et je croquerai des feuilles de bambou en t’effleurant la peau. Et nous danserons en apesanteur, les poils en éventail.

Le coq chante le nouvel an lunaire

En ce jour de nouvel an vietnamien (et chinois), j’appuie sur la touche « be kind rewind » (sois sympa, rembobine), et je ne me débine pas. Avec mes petits bras musclés, je remonte le fil de ma pensée et transite par le mot « philein » (aimer). C’était début février 2016, un dimanche soir, j’allais retrouver pour la 1ère et dernière fois « ma belle famille » dans le quartier de la Porte d’Ivry, avec un prétexte, fêter l’année du singe entourée de dragons, la gueule enflammée, et la queue entortillée. Mes yeux virevoltaient au milieu des pagodes, je nageais en plein Mekong, le cœur doppé, sous oxygène. Dépaysée par le sentiment d’être on ne peut plus présente, je dansais sur des musiques américaines interprétées par des vietnamiens. L’orchestration sirupeuse à souhait donnait l’impression qu’il ne manquait plus que les Yakuzas. Mais bientôt, je serais terrassée et reviendrais sur terre…

Aujourd’hui, je me sens à la fois « coq » et « singe humain », incarnant un être hybride, tantôt bête tantôt intelligent. Comme tout volatile j’avoue m’accomoder des situations de merde mais aussi j’aime singer, l’homme, le bipède, prendre des distances, la tête dans les lucioles de la forêt de bambou parisienne.

Allez hop, finie la nostalgie, j’ouvre le bal, je saute et je danse sur les voitures, tout en chantant mon émerveillement de la possibilité de transformer les rêves en réalité et de croire à un « la la land » possible. C’est plus qu’un joli film américain qui revisite la comédie musicale et ses thèmes favoris : l’Amour, rêver sa vie ou vivre ses rêves… Il invite à oser être soi, à affirmer sa différence même si les obstacles peuvent être multiples.

Cocorico ! Soyez-vous et dansez dans le métro :)))

Croquer la vie

Entre inondation d’informations pas vraiment dignes d’intérêt et inondations dont on ne parle pas alors que la vie est en danger, je choisis la voie B, celle de la sécheresse en mots et en parole pour mieux servir la richesse de la pensée et des idées. Que faire ? Qu’est-ce que je peux faire ? Je ne sais pas quoi faire ? Naviguer jour et nuit, qu’il pleuve ou que la canicule nous brûle les cuticules, et combattre la pollution humaine, en croquant la vie, vaille que vaille. Et vogue le navire…prêt à prendre la vague car l’équipage a levé l’ancre, sans baisser les yeux, bien au contraire.

Hello « soyons Cosi et remuons notre Q » …

Il fait beau, c’est l’instant idoine, pour voir ce qui se passe dehors, ailleurs, et prendre le temps par dessus la jambe, mû(e) par la seule envie de ne rien faire que d’errer, musarder, aérer tout ce qui le peut. Enthousiasme, et audace mes ami(e)s, car pour sortir de soi et de son chez soi, il faut oser déposer son cul de la commode, ce qui n’est pas toujours aisé… Seul bon réflexe, vital, s’emmitoufler en ce jour d’hiver, de ce côté du globe. Ainsi, un bonnet de lutin, des moufles de perlimpinpin et une écharpe de laine sans oublier une culotte fourrée pour son popotin apparaît comme un moment de lucidité et de bienveillance à son endroit.

C’est parti, j’ouvre la bouche avec satisfaction et l’air que je respire c’est un de ceux de « Cosi Fan Tutte » que je trimballe dans ma tête jusqu’à mes godillots. En rythme, je me balance sur le bitume, comme si j’étais sur une gondole et que je jouais de la godille. Suit alors un ballet qui prend corps et s’ouvre à mes yeux et mes oreilles, un élan qui ne fait pas semblant, un mouvement qui succède à un autre et qui me donne une joie intérieure. Je me retrouve dans la ronde, dans l’espace, dans le swing chantant et je me raconte l’histoire de cet opéra bouffe merveilleux. Tout y est futile, léger, et je vole en virevoltant. La danse est un dialogue musical qui vient du dedans tout en me rapprochant du monde ou des mondes.

Je me laisse flotter sous le ciel bleu aux côtés de Fiordiligi, Dorabella et don Alfonso. Les étoffes de leurs voix me rendent muette, je joue du clavecin et les regarde avec fascination pendant leurs récitatifs. Je m’imprègne de l’oeuvre ou l’oeuvre m’imprègne, je fais des entrechats, je n’ai pas froid, je vocalise, le murmure ne se voit pas, et je chante tout bas

Soave sia il vento
Tranquilla sia l’onda
Ed ogni elemento
Benigno risponda
Ai nostri desir.

Suave soit le vent,
Tranquille soit l’onde,
Puissent tous les éléments
Favorablement répondre
A nos désirs.

École buissonnière (folle journée)

Demain y a école mais je taillerai bien la route. Pour aller où ? Peu importe, l’idée est de s’aventurer dans l’instant, de tendre le cou, de fendre le vent, et de se sentir vivant.

Je veux bien voyager nulle part l’important étant l’impression qu’on voyage même sans bouger.

Je veux bien aimer, même si je suis seule, dans mon nid, l’essentiel c’est l’amour en valeur absolu, aimer la vie, aimer les êtres vivants, aimer ce qui vous anime, aimer le voyage, sans ancre ni cap, aimer tout court, s’aimer aussi.

Dans mon étagère 

Ce soir, mes yeux errent sur une chaîne de TV, j’observe aussi avec mes oreilles des politiques et des journalistes qui s’invectivent à propos de la position de la France et de l’Occident vis-à-vis de la guerre en Syrie, qui ne font pas la même analyse sur les forces en présence, et les solutions à étudier sachant que tous s’accordent sur la nécessité d’arrêter ce massacre. 

Ma tête se perd dans de vagues divagations et la marée me ramène sur terre, dans mon corps plein d’attaches, les pieds pas très tranquilles.

Mon esprit erre à son tour dans mon étagère, occasion de faire mon inventaire légal. Que reste-t-il d’humain, quand une ville millénaire est quasi détruite et rayée de la carte ? Qu’est-ce qui peut encore nous soulever lorsqu’on est vaincu ou moribond ?

La folie, celle d’espérer, de croire, de savoir, d’avoir la certitude que l’Homme n’est pas qu’un loup pour lui-même, qu’il est aussi à la recherche d’un autre monde, de fraternité et que cet autre monde est possible, et pas seulement dans mon étagère…

Et après, et après, la nuit peut ouvrir des portes, et éclairer une vision qui nous réconcilie avec l’étranger qui sommeille en nous et donc avec les Autres qui ne sont pas plus étrangers que nous.

Dans mon étagère, l’étrange étranger erre mais cela ne lui paraît pas étrange.

Quand la lune décroche …

Allo, ici la terre, on raconte que la lune veut décrocher. Elle a décidé de ne plus sortir aussi souvent, la nuit. Elle aimerait changer de rythme. Elle pense aux 35h, cela lui donnerait du temps, pour le crochet et jouer au clair de…

Comment décrocher cette idée saugrenue de la tête (blonde) de la lune ?

En envoyant un rêveur chez elle, dans ses quartiers, un cosmonaute qui aurait la tête dans la lune et qui lui donnerait envie de sortir prendre un bain de minuit, dans la mer de la tranquillité.

Sauf que si la lune sort à minuit et que le soleil se couche avant, que se passera-t-il entre temps ?

Ce sera un moment sans soleil ni lune, un état de vie suspendu, de lévitation entre terre et ciel, l’occasion de re-inventer le monde et de flotter dans l’air, la tête remplie d’idées folles, sans qu’au fond ce ne soit si grave car la gravité demeure un des piliers de l’impermanence des choses.

Bonne nuit les petits, au clair de…  en écoutant le lever du jour de Daphnis et Chloé de Ravel.

Vol orange d’un simple regard

Sur les recommandations de mon ami spiritueux et breton Philippe, the magic mushroom et plumitif guy à certaines heures pâles de la nuit, j’avais confectionné une robe en peau de faisan pour prendre mon envol et m’éloigner de mon nid trop douillé.

Pour sortir de ma torpeur, rien de tel que de s’imaginer au volant d’un carrosse orange, et de jouer à Cendrillon Version 21eme siècle.

En ouvrant l’œil, j’ai rencontré l’objet du délit, une Porsche couleur citrouille, pleine de jus, prête à démarrer et à faire un tour loin de son sage garage.

Je l’ai volée par la pensée, elle s’est laissée emportée, car elle s’ennuyait au fond de son écrin.

Le chemin n’existait pas, les feux de nuit éclairaient le jour, ma robe en peau de faisan bourgeonnait et laissait poindre le bout de ses ailes, je me questionnais quant à cette drôle d’histoire.

Les virages avaient disparu, je longeais la mer qui me conduisait au-delà des vagues.

La navigation fut tranquille, je me suis endormie, le carrosse s’est évaporé d’un simple regard, sous l’œil complice du soleil orange qui avait éteint ses phares.

Purée de ciel : au royaume des particules fines

Drapé de bleu azur, le ciel ressemble à ce qu’il est. Mais depuis le milieu de l’après-midi, c’est la confusion. Là-haut, la purée de pois s’est répandue à tous les étages du paysage puis s’est déversée sur les rideaux de nos paupières et notre vision semble raccourcie, heurtée par trop de gris.

Quelques conseils avant de sortir « s’aérer ».

Sous un ciel de purée de pois, il convient de se couvrir la tête, on ne sait jamais ! Ainsi, il est toujours possible de récupérer les déjections des nuages, pas toujours très sages, de les recycler et de préparer une soupe en prévision de l’hiver. La purée de pois est riche en propriétés inconnues.

Il paraît que qui sait regarder de près verra mieux le ciel, les jours de purée de pois, et avec un peu de carotène, il pourra même apercevoir le marchand de sable tapisser d’or et d’encens, et parfois de whisky, les chemins vicinaux qu’emprunte le Père Noël. Les spiritueux motivent le Père Noël, et le rendent même spirituel. Parfois, un peu trop « maltophile », il négocie mal les virages et et atterrit dans les décors ce qui occasionne des retards dans ses livraisons mais son renne le remet toujours sur les rails.

Aussi, il convient de mettre un masque sur sa bouche, une feuille de vigne de préférence. Or, à Paris, il suffit de se baisser, pour en détacher une du bitume. C’est idéal pour passer incognito et surtout c’est un vrai bouclier naturel, recommandé par les écolos, pour ne pas respirer des particules fines.

Autre solution, rester chez soi, dans son nid, même si on est guère mieux protégé contre l’invasion de ces particules de CO2. La parade, quand on est entre quatre murs, diffère du masque protecteur. L’idée consiste à développer des pensées par derrière, pour ne pas se laisser polluer par sa respiration de devant. On ne parle plus, mais on réfléchit pleinement par le dedans et là le ciel redevient bleu azur et le gris se fait croquer par Médor Pas qui rêve d’un ciel rempli de souris.

Boule de neige

Il fait froid, le soleil nous donne Rdv avec le ciel, un ciel sans neige.

Pour se rapprocher de l’état d’esprit de Noël, l’heure est aux petites trouvailles qui nous ramènent du côté de l’enfance et de la boule de neige, l’autre, celle qui ne fait pas froid dans le cou ou sur la joue, mais celle qui émerveille.

Chez « Merci », les étales proposent des jolies boules de neige, des petites et des grandes, habitées par des sapins, un Père Noël ou deux enfants comme ici, qui s’apprêtent à s’embrasser. Et autre découverte, une boule avec un revêtement de type ardoise qui permet d’écrire des pensées, des vœux ! Enfin, des petits ornements pour le sapin, fragiles, mais très beaux, on croirait qu’ils proviennent du grenier de nos ancêtres.

C’est bientôt la fête, rien que de décorer la maison, c’est un « avent » goût de ce moment particulier à venir (souvent festif et familial).

TagS # du pays qui verdoie : ô Mon doux Vendômois 

Le street Art c’est la possibilité d’intégrer l’Art dans le réel, de transformer le réel en Art, de confondre les deux et ce, sans discrimination, sans prix à payer pour celui qui regarde.

L’Art de la rue n’est pas l’apanage de quelques-uns mais de tous. Seulement, il faut avoir la chance d’avoir des yeux ouverts, en face des trous, vifs, curieux, attirés par l’œuvre nouvelle, celle qui renouvelle le monde et le regard que l’on porte sur lui.

Les tagS une réflexion du monde en train de se défaire et de se refaire, offerts à des yeux qui sont prêts à ne plus voir pareil et surtout à regarder derrière l’eau qui verdoie et le ciel qui poudroie…

Une rose en novembre

A Villetrun les bains, station balnéaire de l’ère quaternaire, une rose a décidé de pousser sur un rosier en hibernation.

En novembre : arrose (ton gosier d’un Pic St Loup, c’est autorisé), ose (sortir en T-shirt) et offre une rose à ceux que tu aimes.

A plein tube (sans vrombir juste pour dire)

Vivre dans un tube, ce n’est pas un sentiment si rare que ca. Dans toutes les mégalopoles du monde, il est de coutume d’utiliser assidument le métro et ses couloirs. A Londres, le métro porte le doux nom prophétique plus que poétique de  « Tube ».

Depuis septembre, je voyage sur la ligne 13 de « Place sans Chichy » vers La Fourche du diablotin côté St Denis, et ce tube-là c’est un concentré de joie qui frise l’extase renversée. Oh la vache il faut être tarré pour se laisser bouchonner dans ces tunnels et ces objets roulants…Mais on y revient…

Alors, pour s’aérer après une journée de boulot, sur proposition de Stéphane, nous sommes allés à Beaubourg, en nocturne, visiter l’expo Magritte. Un peintre aux multiples influences littéraires et philosophiques, surtout Pline l’Ancien, Platon « l’allégorie de la caverne » et Hegel. Nous étions nombreux mais nous pouvions voir et nous laisser conduire par le regard décalé et interrogateur de Magritte sur l’illusion des images.

Le tube comment l’aurait-il représenté ? Un tube ouvert vers le ciel, comme si, à Beaubourg, les tuyaux qui font circuler les visiteurs aboutissaient à des perspectives célestes !

La photo de Stéphane prise dans un des tubes du Centre Pompidou, la nuit, nous propulse dans le troisième millénaire. Magritte visionnaire, l’Homme sans visage.

Avec YouTube le tube vient à toi, plus besoin d’aller le chercher du côté du métro ou de Beaubourg.

Néanmoins, en ce début de we, sortons du tube ! Prenons l’air, oxygénons nos petits muscles.

Une tête qui sent passer les courants d’air

Cette statue peut être observée au Pergamon Museum de Berlin sur l’île aux Musées. Finalement, même sans ses yeux ni le haut de son crâne, cette statue nous raconte un truc. En se rapprochant de ses lèvres, ce soir, elle m’a dit qu’elle s’aprêtait à lancer une mode. Ainsi, la nuit, on pourrait décrocher son cerveau, le brancher et le régénérer sur un disque dur, ou sur un autre cerveau. Pendant ce temps on s’aérerait le reste de la tête, pour mieux sentir les courants d’air et on laisserait voyager nos yeux pour qu’ils reviennent remplis d’images inter-galactiques.

Faut dire que sans passer par les récits d’anticipation, certains soirs, je me sens lobotomisée, et en peine de pouvoir voir avec mes yeux.

Visionnaire cette statue, décidément l’Art Grec !

 

 

 

Ô chère ligne 13 …. si loin de nos vertes vallées

« Treize » exactement la ligne du métro parisien qui porte le numéro porte bonheur c’est la M….

Habituellement je me sens sardine sur la ligne 13. Mais ce soir c’était le pompon. Départ du boulot vers 20h, et me voici ou plutôt voilou (pour ne pas dire hum hum) nez à nez devant un magma de gens qui ne pouvaient passer les tourniqués. 3/4h d’attente, because, colis suspect. Pas de chemin de traverse, juste des énervés et des malabars pour nous empêcher de patienter en paix, tranquillement, le nez dans la verdure, sous un paysage de rêve.

Ah, ou plutôt ô joie, embarquer sur cette fabuleuse ligne 13, c’est comme de sillonner au coeur de ces magnifiques paysages désertiques américains, ça donne à penser, et à se projeter comme le chat du Krazy Kat de Herriman. C’est un drôle de monde absurde, et poétique à la fois, qui aide à pécho sa dignité !

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L’âme du « faune » (sans 4G)

Du jardin du Luxembourg au Finistère en passant par Debussy et Picasso

L’heure est au « phone », à sa petite musique de mots, à peine écrits qu’ils s’effacent, mais aussi, à son ouverture sur un univers du possible, inter-planétaire, ultra-connecté qui dépasse les mots. La constellation du « phone » nous satellise, nous fait voyager, et parfois, nous déconnecte de nous-même.

« Qu’il fasse beau qu’il fasse laid », j’aime à changer d’air, retrouver l’univers du solide, du tangible, et paradoxalement celui des mythes grecs, ce n’est pas mieux me direz-vous, et bien pas si sûr, car c’est un retour aux sources, aux fondamentaux, qui aide à passer du virtuel à l’Humain. Le mythe n’est-il pas une lecture saine de l’Homme et de ses passions, une façon de nous faire réfléchir sur le mode de la métaphore et de l’auto-dérision sur le dérisoire et l’essentiel, pour mieux nous aider à revenir sur terre.

J’avoue ma proximité pour le « faune » du jardin du Luxembourg. Pas de sonnerie entêtante, j’ouvre grand les yeux, et je me laisse envouter par le son muet de sa flûte. Je le suis avec mes oreilles pointues, fruit d’un mimétisme naturel, et je me rappelle les notes du prélude à l’après-midi…Des petites cornes poussent comme des feuilles d’hêtre sur ma tête, une longue queue bourgeonne derrière mon sacrum, et je pars, ailleurs, sautillante, esquissant les pas d’une danse légère, mue par un sentiment de bien-être et de détachement, en équilibre instable sur le sol. Mais le plus fort, c’est lorsque s’invite l’autre « faune », celui que l’on n’attendait pas, et que vient le moment de danser à plusieurs comme sur la lithographie de Picasso « la danse des faunes ». Nous célébrons alors la vie ses joies, ses peines, tout en jouant, le corps en mouvement. Et, pour poursuivre au pays des « faunes », au bout de la terre de ma chère Bretagne, j’en ai rencontré un, en eucalyptus, sculpté par Virginie Ferragu. Sa tête lubrique me rapproche de la réalité et de mes Humains d’amis qui le sont tous plus ou moins… »faunes ».

 

 

Rêve de glisse…je glisse dans le rêve 

Surf, skate, roller, trottinette, le sport ou l’activité de glisse est tendance. Les sensations sur l’eau ou sur terre ne sont pas comparables. Une vague ça envoie du lourd, le bitume ça remue moins. Dans un cas, c’est la mer qui t’emmène, et dans l’autre, c’est ta propulsion qui emmène le bitume avec toi.

Ce soir, je rêve de glisse les yeux ouverts, je me dis « ecce omo », la vie c’est comme la glisse, parfois on se régale, parfois on galère car on rame à contre courant. Mais la glisse c’est tellement bien qu’on y revient. Vous prendrez bien encore un peu de réglisse !

Plus confortable sera le moment, tout à l’heure, où je glisserai dans le rêve, après avoir brossé mes dents au dentifrice à la réglisse…

BBB : Bach, Bill et la Bretagne (et la mouette)

Ce soir, la composition « peace piece » de Bill Evans enveloppe l’air, libère les notes et invite à faire des petits pas, comme Basho sur sa sente étroite du bout du monde. Son phrasé couvre, sans faire de bruit, celui des moteurs ronronnant du périph.

De Bill à la Bretagne, le chemin est escarpé, il passe par le Canada, les grands espaces, et la maison de Glenn Gould. La partita n°3 accélère le pas. Il ne fait pas encore froid, bien au contraire.

Et hop, l’oeil s’échappe de la fenêtre de l’hôtel Vauban sur le port du Palais, à Belle Ile, pour sillonner la côte, Douarnenez, la pointe du Raz et sa baie des trépassés, et prolongations jusqu’à Locquirec avant de retrouver la douceur de vivre d’un petit port de Loire Atlantique, tout près du Captain et des siens.

Avec dans la tête, le souvenir de lecture d’un très joli conte, « histoire d’une mouette et du chat qui lui a appris à voler » dans lequel Sepulveda écrit « seul vole celui qui ose le faire ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Promenade photographique

Kusama, Nancy et mon amie C.

Yayoi Kusama est une artiste japonaise octogénaire, obsédée par les pois, et créatrice d’une « infinity room » qui se referme sur son visiteur tout en lui ouvrant des perspectives illimitées. Je me suis engouffrée à l’intérieur des quatre murs, après avoir passé le seuil de la porte, attirée par les petites diodes colorées de lumière, entourée d’eau et de miroirs.

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L’image renvoie son reflet sur d’autres miroirs et ainsi de suite. Tel l’arroseur arrosé, le photographe est pris dans son propre jeu. Narcisse est bien présent.

Cette rencontre s’est produite, de manière inattendue au musée des Beaux-Arts de Nancy, qui vaut le détour, rien que pour Emile Friant, peintre local, admiré de Philippe Claudel et de mon guide lorrain C. Ce peintre avait l’œil et le pinceau précis, vous serez emportés par les scènes de vie, et de deuil, et amoureux de ses portraits de femmes. Des toiles que pourraient jalouser nombre de photographes.

En grattant dans ma boîte crânienne, cette pièce infinie de Kusama, je l’avais déjà visitée au centre Pompidou de Paris, sans avoir goûté les mêmes saveurs qu’en Lorraine. Les objectifs avant et arrière ont tiré un fil, il fallait poursuivre, explorer, Janus, Ariane, Antigone, et la Pythie devenaient de nouveaux compagnons de voyage.

Perspectives et photographie (suite)

L’autre, la BNF

D’une grande bibliothèque à l’autre, je me téléporte rue Vivienne et rencontre un maneki neko, en vitrine de l’autre côté de l’agence France Presse. Je pense à Chris Marker, à son amour pour l’Asie, les femmes, la photographie, et le mystère de ses identités, des cercles reliés à son adresse de poste restante. Je regarde son film roman photo « la jetée », photo synthèse des 3 temps d’une vie et de l’amour. C’est mon vieil ami le Docteur Jacques B. qui me l’a fait découvrir, lire, et voir, et lui aussi, fait partie de ma mythologie vivante. Sans lui, je ne connaîtrais pas Kathleen Ferrier, les nuits d’été par Régine Crespin, ou l’intégrale Ravel pour piano, entre autres.

« Chris », comme le citait Jacques a réalisé un documentaire tendre sur Simone Signoret qui aimait aussi beaucoup les chats. Sans réussir à en percer le mystère, je vous invite à lire « Chris Marker le livre impossible » de Mouroussia Vossen, qui fut une amie proche.

Dans cette rue se situe à l’arrière de l’ancienne boutique de Jean-Paul Gaultier le bar à cocktails génial de Paris, Danico, créé par un bartender doué et reconnu worldwide Nicolas de Soto. Sa carte est très originale, depuis le choix des noms des cocktails (« l’herbe est plus verte ailleurs ») en passant par leurs recettes (ils font aussi les classiques, dont un somptueux Rob Roy), sans oublier le choix des whiskies et des spiritueux jusqu’aux associations détonantes (sirop de betterave et aquavit…). Et à l’avant, Daroco, restaurant italien souvent bondé et plutôt sonore. Je vous incite à y aller l’après midi pour déguster un tiramisu de folie, les noisettes entières légèrement torréfiées apporte un goût caramélisé fondant, assorti d’un café d’une rare et belle acidité. Les serveurs portent tous des marinières, car l’ombre de JPG plane encore… et nous aussi. Et au plafond, un miroir qui occupe toute la surface sur lequel sont suspendues des lampes multiples et différentes, un endroit idéal pour la photo synthèse.

 

Perspectives et photographie

Une des grandes bibliothèques

Les ombres des passants auraient pu donner lieu à une représentation de marionnettes indonésiennes. Après deux heures, mon œil a dévissé de ses objectifs, je me sentais vidée par le niveau de concentration demandé. Heureusement, nous avons fait un break, le temps de boire un verre, et d’échanger nos regards avec des mots. Et puis nous avons suivi la marche du soleil avant de découvrir par hasard un cours de step en plein air, tout près de la bibliothèque François Mitterand. C’était joyeux, coloré, plus léger que la sortie photo car l’architecture contemporaine envahit, accapare, et parfois désintègre le regard. Je me sentais comme un petit pois de Kusama et c’était chouette d’avoir la sensation d’un début de collier de perles pour ne pas dire de petits pois !

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Horta en Alentejo

Dans le sud du Portugal, en Alentejo, si vous voulez vous reposer, à la verticale ou à l’horizontal, rendez-vous à Horta de Torrejais. C’est un havre de paix, au milieu des oliviers et des grenadiers, les hôtes ont le sens de l’accueil, ils aiment leur endroit, le cultivent bien et donnent envie d’y rester. Humeur vagabonde…

Pour en savoir plus sur Horta de Torrejais