Ce que l’enfance m’a donné, c’est l’amour, la poésie, et l’amour de la poésie. Depuis, je creuse dans la neige, sous le sable ou le bitume, et parfois j’aperçois des morceaux d’amour, des bribes de poésie et je sens mes ailes d’enfant repousser le réel et franchir les barrières du ciel. D’un coup d’aile, je m’envole dans l’univers du merveilleux.
Nue dans la neige, je n’ai pas froid, je fabrique un peu de poésie et d’amour dans mon jardin Villetrunois immaculé de cotons blancs que j’ai dérobés de la trousse à maquillage de maman. Je regarde ces boules légères et elles me regardent à leur tour, et parce que c’est inévitable, on se met à rigoler. Je convoque le vent et les flocons frissonnent. Ils se collent les uns aux autres puis à moi. Je me transforme en petite femme de neige. Une carotte biologique vient à pousser sur mon nez. De l’encre noir foncé et épaisse se rigidifie et s’invite sur mes yeux. Un rouge à lèvre or et ange vient s’écraser sur mes lèvres. Le baiser d’une princesse du grand nord m’endort. Je me mets à rêver à l’âge adulte, à une impossible aventure certie du bonheur d’aimer et de la souffrance amoureuse.
C’est l’heure où Noël approche de son heure, les saveurs beurrées du tea time embaument le salon, j’ai fermé les yeux, la casquette irlandaise de papa vissée sur mon crâne en ébullition et mes lunettes de vieille anglaise m’autorisent à retourner dans l’enfance dont je ne peux me départir.