Retour à la maison, après avoir vécu, hier après-midi, une expérience sur scène – désignée, absolument volontaire, au hasard Balthazar, entourée de 9 danseurs.
Le spectacle, Takemehome, à l’affiche du théâtre national de Chaillot, créé par le chorégraphe Dimitri Chamblas, sur une musique originale de Kim Gordon du groupe Sonic Youth, se jouait pour la dernière, à 15h. Ce fut, tour à tour, relaxant et électrisant puis relaxant. Marion Barbeau, 25 ans, première danseuse de l’Opéra de Paris était de la partie.
Une danseuse rasée, les seins tout petits, se laissant deviner derrière un tee-shirt ajouré, avant le commencement du spectacle, est venue vers moi alors que j’étais perchée tout en haut. Elle m’a fixée, puis demandé au creux de l’oreille si je voulais bien marcher lentement sur la scène, avant de m’allonger et de faire comme si je dormais. J’ai répondu oui, le sourire aux lèvres, et je lui ai dit merci. Elle m’a tenu la main et guidée en descendant les marches, avant de s’éloigner.
J’ai longé la scène dans la pénombre, et déposé ma carcasse, parallèle au mur, à gauche du balon. Je somnolais quand un danseur du Burkina Faso m’a regardé de ses yeux profonds, alors que j’ouvrais mes paupières, je me suis dit mais non, ne le regarde pas comme ça, « dors », active tes autres sens. Tout n’était que vibrations, j’entendais leurs déplacements à travers le crissement de leurs pas sur le sol, je devinais les corps des danseurs en extension, et sentais par résonance quand ils retombaient sur leurs pieds, le sol remuait et mon corps restait immobile, j’écoutais mon coeur, je ne bougeais pas, j’inspirais et j’expirais, en silence. L’espace temporel s’était densifié, et, peut-être 10 min après le début, un autre danseur m’a pris la main et nous avons fait plusieurs fois le tour, sur les côtés, et en diagonale, avec 8 autres témoins amateurs comme moi. Je regardais sans voir, au loin, la pensée ancrée dans cet instant d’éternité, et j’ai regagné mon fauteuil, en longeant le 1er rang et remontant les marches. Le danseur qui me dirigeait sur scène, apparaît à gauche de Marion, sur la photo mise en avant, son regard vous saisissait et pénétrait, comme les 8 autres.
Le spectacle parlait de la solitude et de duos, de synchronicité, de la beauté d’être mêlés, entremêlés, et d’allers retours vers une vie repliée sur soi pour mieux repartir ici ou ailleurs.
Un ballon dirigeable dominait la scène, abordant des couleurs chaudes.
La musique de Kim Gordon accompagnait et jouait parfois le 1er rôle, 5 guitares sonnant ensemble, branchées sur des amplis, ça réveille, et puis, à la fin, le silence, le danseur chorégraphe du Burkina, seul sur scène, esquisse ses derniers pas avant de disparaître à son tour.














