Castor et Pollux : un opéra d’aujourd’hui ?

Garnier, cossu, majestueux, doré, plus que décoré, admiré, feutré, destiné à la danse, et aux opéras de Mozart ou au Baroque, voire aux œuvres contemporaines à la mise en scène resserrée, mon préféré, le plus près, le plus beau, et qui fait tout aussi mal au portefeuille que l’autre, sis place de la Bastille, dit opéra populaire, et qui, en théorie, accueille plus de monde (2.745 vs 1.979 spectateurs), en offrant une visibilité parfaite, tout en s’effritant, au propre et au figuré, comme le reste d’ailleurs.

Ma lueur, toute relative d’optimisme, n’est-elle pas le contre-coup de « dry January » (expression mal à propos vu les trombes d’eau et les inondations), un cocktail sans alcool, le fruit du bouleversement climatique, avec une dose de présidence dissoute, mixée à l’intox médiatique ambiante … autant de bonnes et mauvaises raisons pour s’aérer et tenter de vivre malgré tout !

Hier, se jouait Castor et Pollux de Rameau dans une mise en scène débridée de Peter Sellars avec Teodor Currentzis à la baguette, chef gréco-russe dynamique en termes de tempo et tout en nuances. Ses mains dépassaient de la fosse d’orchestre, nous aurions dit que des anges volaient.

Des danseurs en capuche, filles et garçons, formaient des figures désarticulées autour des chanteurs immobiles, tandis qu’en arrière-plan, des vidéos rendaient compte des effets des sites urbains et industriels sur les forêts millénaires et « notre » planète en sursis. Une scénographie déconcertante, on ne peut plus ancrée dans l’époque, pour une oeuvre hors du temps !

Plus de 3h c’est long, malgré l’entracte. Les airs chantés sont répétés sur un ton monocorde et articulés inlassablement, mais fort heureusement entrecoupés, de très beaux chœurs et de moments instrumentaux mélodieux.

La découverte lyrique fut le jeune chanteur Laurence Kilsby, ténor britannique, admirable, le plus applaudi qui incarne l’Amour, un grand prêtre et un athlète, rien que ça !

L’oeuvre est intéressante et plaisante mais le livret s’étire en longueur, elle gagnerait à être plus concentrée, même si ce serait un sacrilège pour les puristes.

En résumé, le pitch : faisons la paix pas la guerre, love and peace et résurrection du mortel grâce à Jupiter, Venus veille, Castor renaît, merci Pollux !

Faut y aller si on peut, rien que pour voir se croiser et s’unir des mondes, la danse de rue et l’opéra, qui, naturellement, ne se côtoient pas ! L’art vivant réconcilie les contraires, et rend possible ce qui ne semble pas l’être.

Cette représentation audacieuse de C&P a été mise en boîte, hier, par des caméras de la TV. A regarder bientôt sur vos écrans.

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