Hier soir, j’ai regardé et goûté une madeleine de Proust, des poussières d’étoile du 7ème art restituées sur un petit écran, confortablement installée dans le salon de ma maison d’enfance.
« Les passagers de la nuit » raconte l’histoire d’une femme, Elisabeth, incarnée par Charlotte Gainsbourg et de ses deux enfants, au début de l’âge adulte, sur une décennie, à compter du 10 mai 1981.
Son mari l’a quittée, elle n’est pas bien, et sans ressources, elle essaie de vivre et d’être une maman attentionnée, et soudain, dépassant sa timidité, elle va proposer ses services à Radio France, de l’autre côté de la Seine, à l’animatrice, Emmanuelle Béart, d’une émission nocturne qu’elle aime écouter, « les passagers de la nuit. »
Ce très beau film porte sur les changements et autres passages, d’une vie à l’autre, au travers de rencontres de hasard qui peuvent modifier le fond des choses, faire du mal et du bien, et réveiller ou éveiller pour aller ailleurs, autrement, avec ces autres aventuriers du monde.
« Les passagers de la nuit » de Mickaël Hers est un film abyssal (il parle du cinéma, la mise en abîme du cinéma qui parle de cinéma est permanente), lumineux (la photo est fabuleuse), et nostalgique (il est né en 1970), tout à la fois. Le directeur d’acteurs a posé sa caméra dans le 15ème arrondissement, dans le quartier de Beaugrenelle construit dans les années 70-80, les couleurs et les panoramas de nuit resplendissent, sans parler des petites lumières carrées de la maison ronde qui clignotent et nous font voyager, tout comme les métros de la ligne aérienne (la 6, Nation Charles de Gaulle).
Les clins d’oeil au cinéma de Rohmer et de Rivette, à travers 2 extraits de films cultes de l’actrice trop jeune disparue du cinéma indépendant, Pascale Ogier (les nuits de la pleine lune et le pont du nord), m’ont remuée. Le metteur en scène mêle intelligemment les images d’archives de films de fiction et de documentaires, ainsi dans le métro, nous apercevons Jacques Rivette ou des inconnus captés 40 ans en arrière. Il a aussi réussi à accompagner son film d’une BO finement choisie, les Pale Fountains, Lloyd Cole, Nits, Kim Wilde et tant d’autres, alternant avec des oeuvres originales instrumentales toute en finesse.
Laissez-vous embarquer, le film est certainement disponible en Replay sur France TV. J’espère que vous serez aussi pris par cette belle histoire toute en douceur et nostalgie.

